La série coréenne Love In The Moonlight

Critique : Love In The Moonlight, avec Park Bo Gum

C’est frais, c’est joli, c’est Love In The Moonlight, le succès surprise qui a embelli l’automne de KBS2 et propulsé Park Bo Gum et la toute jeune Kim Yoo Jung sur le devant de la scène.

Avec son histoire d’amour contrarié entre une tendre héroïne immaculée et un beau Prince au grand cœur, Love In The Moonlight (ou Moonlight Drawn By Clouds) est un drama coréen historique qui s’apparente à un pur shôjo anime live. Malgré un scénario creux et une caractérisation décevante de son héroïne, il reste un divertissement honorable aux qualités plastiques indéniables, largement rehaussé par l’excellente prestation de Park Bo Gum.

Le pitch de Love In The Moonlight nous emmène dans l’ère Joseon, au 19ème siècle. Orpheline, Hong Ra On (Kim Yoo Jung) a été contrainte de se déguiser en garçon depuis sa plus tendre enfance. Un jour, elle fait la connaissance d’un jeune homme du nom de Lee Young (Park Bo Gum), sans se douter que celui-ci est en réalité le Prince Héritier. De son côté, Lee Young ne sait pas qu’elle est une femme. Rattrapée par ses créanciers, Ra On est vendue comme esclave au Palais et recrutée comme eunuque. Là, elle se retrouve au service du Prince Héritier qui ne tarde pas à lui manifester son affection. Mais elle éveille aussi l’attention de Kim Yoon Sung (Jinyoung), le fils du Premier Ministre Kim (Chun Ho Jin), qui est le meilleur ami du Prince…

Vous l’aurez compris avec une histoire aussi invraisemblable, Love In The Moonlight est bien du pur shôjo live. Il est d’ailleurs amusant de voir qu’il était en compétition sur son créneau avec le drama de Lee Jun Ki Moon Lovers: Scarlet Heart Ryeo, qui appartient exactement au même genre, la dimension fantastique en plus. On rencontre par conséquent ici et là quelques anachronismes gentillets dans les comportements amoureux. Je pense notamment aux propos pleins d’empathie de Yoon Sung au Prince au sujet de Ra On (épisode 10), ou à la proposition en mariage du débonnaire lettré Jung, joué par An Se Ha.

Park Bo Gum dans Moonlight Drawn By Clouds

Le monde des eunuques est dépeint avec une extrême naïveté, l’ambiance est bon enfant malgré quelques coups bas de la part de certains énergumènes. Le drama ciblant un public jeune, ce parti-pris ne gêne pas outre mesure. Cela nous permet de profiter de scènes insouciantes dans la première partie, avant que les personnages ne soient rattrapés par leur destin.

Ce qui frappe avant tout dans Love In The Moonlight, c’est son esthétique étonnamment soignée pour un drama, qui plus est un drama au contenu aussi léger. Les décors sont simples mais très beaux, à l’intérieur du palais (la chambre du Prince) comme en dehors (le petit jardin secret du Prince et de Ra On).


Les costumes, surtout, sont absolument resplendissants. Le Prince, qui aime se fondre parmi ses sujets, arbore ainsi différentes tenues parmi les plus somptueuses que j’aie vues sur un acteur de sageuk. J’ai un faible pour ses hanbok rouge (épisode 2), bleu (épisode 6) et vert d’eau à motifs (épisode 7). La garde-robe de Ra On est moins éblouissante mais sa belle robe vert émeraude, plus vive que celle des autres eunuques, est emblématique de sa personnalité enjouée. On la préfère malgré tout en fille, lorsqu’elle est vêtue de superbes hanbok aux couleurs pastel évanescentes.

Quant à Yoon Sung, il porte des tenues qui évoluent drastiquement au fil du drama, tandis qu’il perd son innocence – un peu comme les robes du personnage joué par de Lee Yoo Bi dans Gu Family Book. Clairs, d’un blanc ou d’un bleu presque translucides au début du drama, les hanbok de Yoon Sung se font plus sombres, presque funestes vers la fin (magnifique association de vert et de mauve à l’épisode 17). Les créations de costumes dévoilées dans Love In The Moonlight mériteraient un article à elles toutes seules.


La photographie est une pure merveille et met en valeur chaque visage d’une manière singulière. C’est d’autant plus saisissant que la composition des plans est vraiment recherchée. Certaines images marquent la rétine, comme ces plans pleins de poésie où Ra On, habillée en fille, exécute une danse traditionnelle devant la Cour, le visage à moitié masqué (épisode 4). Ou encore ce plan fixe tout simple dans lequel le Prince et Ra On se font face, la tête posée sur le même bureau (épisode 12). L’ensemble est sublimé par une réalisation très élégante.

Love In The Moonlight a été comparé au drama Sungkyungkwan Scandal (2010) avec Park Yoochun et Park Min Young. Les deux dramas mettent en scène une héroïne de condition modeste, qui se voit contrainte de se travestir afin de survivre dans un milieu masculin. Attirant bien malgré elle l’attention de plusieurs beaux jeunes hommes, cette jeune fille trouvera l’amour auprès de celui dont les principes moraux sont les plus forts. Mais là où Sungkyungkwan Scandal possédait plusieurs dimensions, allant jusqu’à délivrer un intéressant propos sur le pouvoir, Love In The Moonlight se contente de proposer à son public une histoire romantique charmante sur fond d’intrigues de cour sans grande originalité.


Autant être clair : sans Park Bo Gum, le scénario de Love In The Moonlight ne retiendrait guère l’intérêt de quiconque. S’il y a l’esquisse d’un fond politique à chercher dans ce drama, Park Bo Gum l’incarne à lui seul à travers son interprétation nuancée de Lee Young, ce jeune Prince fougueux, épris de justice, qui se heurte à la lâcheté et à la cruauté des adultes au pouvoir. A commencer par son père, le Roi, un homme complètement idiot, tellement influençable qu’il s’avère être l’un des personnages les plus nuisibles de l’histoire. Le Prince doit aussi déjouer les pièges tendus par le Premier Ministre Kim, joué par Chun Ho Jin (Bridal Mask), grand habitué des rôles de méchants.

Remarqué à travers des seconds rôles dans Reply 1988 et l’excellent Hello Monster, Park Bo Gum négocie par conséquent avec virtuosité le difficile virage vers un rôle principal. Je suis très agréablement surprise par son aisance dans l’univers du sageuk, par sa diction et son maintien parfaits. Son visage est beau, très découpé, et il possède une sorte de distinction naturelle qui en fait l’acteur idéal pour le rôle. Il révèle une versatilité étonnante tout au long du drama, notamment lors de ses démonstrations d’autorité face aux ministres qui conspirent contre lui. Une belle découverte.


Love In The Moonlight réserve en revanche un traitement indigent à son héroïne Hong Ra On. Après avoir tenté de nous la faire passer pour une jeune fille hors du commun, les scénaristes Kim Min Jung et Im Se Jin (Who Are You: School 2015) multiplient les séquences prétextes à la montrer en situation de détresse. On ne compte plus les fois où Ra On se retrouve menacée, voire kidnappée par les individus les plus abjects (un négociant chinois, l’affreuse reine) pour se retrouver impuissante, en pleurs, sans autre choix que d’attendre d’être sauvée par un homme – généralement le Prince, mais il n’est pas le seul.

Pour un drama romantique lorgnant du côté des adolescents et jeunes adultes, on aurait aimé une héroïne plus volontaire, plus charismatique. Ra On est d’une passivité affligeante tout au long de ses aventures. Tandis que le Prince, Kim Yoon Sung ou le sabreur Kim Byung Yun se déplacent constamment pour mener à bien leurs projets, Ra On reste la plupart du temps enfermée dans le lieu qu’on lui a désigné (le palais, sa maison), et va là où on lui dit d’aller. Il n’y a rien qu’elle décide seule, ou presque. Elle ressemble à ces héroïnes de shôjo manga qui ne se définissent que par leur (irréaliste) gentillesse et leur propension à se sacrifier pour les autres.


Le souci est encore aggravé par le choix de Kim Yoo Jung pour endosser le costume du personnage. Oui, la délicieuse petite surdouée que l’on a admirée dans Iljimae (elle avait 8 ans !), Gumiho: Tale of the Fox Child et bien sûr The Moon Embracing the Sun. Dans Love In The Moonlight, Kim Yoo Jung a 16 ans, elle est toute mimi mais bien trop jeune pour le rôle. Les deux protagonistes principaux sont censés avoir 18-19 ans, or elle a l’air d’un bébé à côté de Park Bo Gum. On ne peut pas un instant imaginer une relation romantique entre eux, et encore moins de tension érotique. Pendant les premiers épisodes, elle est constamment en train de rouler des yeux, la tête baissée et l’air contrit d’une gamine prise en faute.

C’est bien dommage car elle dévoile peu à peu un jeu subtil dans certaines scènes de la deuxième partie de Love In The Moonlight. Kim Yoo Jung et Park Bo Gum partagent ainsi tout de même quelques jolis moments, comme cet échange dialogué très sobre qui clôt l’épisode 11 de façon émouvante. La jeune actrice aurait été parfaite dans le rôle de la petite sœur de Park Bo Gum.


Le fait que Kim Yoo Jung soit mineure, face à un partenaire de sept ans son aîné, a choqué certains téléspectateurs. Le KCSC, le CSA local, s’en est finalement mêlé après la diffusion du dernier épisode. La chaîne KBS2 s’en tire avec une simple « recommandation » mais les choses sont dites. Et pour une fois, je trouve la polémique justifiée. On ne protègera jamais assez les adolescentes, qui sont particulièrement vulnérables dans l’industrie du divertissement.

Quant à l’autre protagoniste féminin, Jo Ha Yeon, elle a beau être la fille du ministre Jo, le seul ministre à oser s’opposer au Premier Ministre Kim, elle se réduit à son rôle d’amoureuse éconduite du Prince. Pour couronner le tout, elle est interprétée par une actrice irritante de niaiserie, Chae Soo Bin (Spy). La Reine vicieuse est un peu plus intéressante, même si on ne peut s’empêcher d’être distrait par le visage de son interprète Ha Soo Yeon, ravagé par la chirurgie esthétique (un front énorme bombé par un implant, des yeux constamment écarquillés à cause d’une opération ratée des paupières).


Parmi les seconds rôles, on retiendra plutôt les deux amis du Prince : le beau et mystérieux sabreur Byung Yun (Kwak Dong Yeon, pur fantasme de shôjo manga) et surtout Yoon Sung, joué avec conviction par Jinyoung du groupe de Kpop B1A4. Discret rival du Prince, ce jeune homme affable ne se résume pas à son amour à sens unique pour Ra On, contrairement à Jo Ha Yeon – c’est là la (trop fréquente) dissymétrie entre personnages féminins et masculins. La relation de Yoon Sung avec son père, le terrifiant Premier Ministre Kim, est finalement plus intéressante que son entichement puéril pour Ra On.

C’est décidément une excellente année pour la chaîne KBS, déjà forte du drama phénomène Descendants of the Sun durant le premier semestre 2016. Avec 18,3% de parts de marché lors de sa diffusion et un pic à 22,5% à Séoul pour le dernier épisode, Love In The Moonlight est un franc succès. Le drama a d’ailleurs catapulté Park Bo Gum et Kim Yoo Jung au sommet du classement des stars les plus demandées par les publicitaires. Espérons que Park Bo Gum fera bon usage de cette nouvelle popularité méritée, et qu’on laissera Kim Yoo Jung grandir encore un peu avant de la plonger dans des histoires trop adultes pour elle.

Caroline Leroy

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Love in the Moonlight : Poster

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