The King Eternal Monarch

Les 5 péchés capitaux de The King: Eternal Monarch

Qu’est-ce qui cloche dans The King: Eternal Monarch ? Voici cinq erreurs à éviter à tout prix dans un K-drama.

La série The King: Eternal Monarch était attendue comme le messie. Diffusée du 17 avril au 13 juin 2020 sur SBS et disponible sur Netflix France depuis le 18 juin, cette nouvelle romance de la scénariste à succès Kim Eun Sook marque aussi le retour de Lee Min Ho devant la caméra. Le drama aurait dû être un carton et nous avions envie d’y croire après un démarrage prometteur dans les deux premiers épisodes. Malheureusement, il a bien fallu se rendre à l’évidence : The King: Eternal Monarch est un flop dans les grandes largeurs.

Pour marquer le coup, nous avons décidé de signer conjointement notre critique et de la présenter sous un format différent. De la réalisation à l’écriture des personnages, en passant par les caprices de stars, découvrez les 5 péchés capitaux de The King: Enternal Monarch.

Histoire : se complaire dans la paresse scénaristique

Le scénario de The King: Eternal Monarch est au cœur du problème. L’histoire repose sur un concept séduisant – deux mondes alternatifs qui s’entrechoquent, des doubles qui se rencontrent – mais passée la découverte du début, le charme s’effondre comme un château de cartes.

Commençons par le concept. The King: Eternal Monarch n’est pas la première fiction à s’essayer aux registres des mondes alternatifs et du voyage dans le temps. On citera le film américain L’Effet Papillon avec Ashton Kutcher et le drama coréen Nine: 9 Times Time Travel avec Lee Jin Wook, qui ont en commun de rester centrés sur leur concept. La série coréenne W: Two Worlds Apart, avec Lee Jong Seok, met quant à elle son idée de monde parallèle issu d’un webtoon au service de la romance. The King: Eternal Monarch adopte une démarche proche de celle de W, à ceci près que le scénario de Kim Eun Sook est loin d’avoir la solidité de celui de Song Jae-Jung.

Le hic, c’est que rien n’est développé dans The King: Eternal Monarch. De l’entre-deux mondes fantastique à l’objet qui ouvre la porte inter-dimensionnelle, les éléments du concept sont négligés et les règles régissant l’univers du drama restent obscures. Au bout des deux tiers du drama, nous sommes à peine plus avancés que nous l’étions au deuxième épisode. Présenté comme un grand mathématicien, le roi Lee Gon effectue quelques déductions faciles, mais ne daigne pas apporter la moindre explication à la plèbe des spectateurs.

Ne parlons pas du cadre narratif du drama. Une fois planté le décor du royaume de Corea à coups d’étalage de luxe et de protocoles royaux, Kim Eun Sook n’a guère plus à dire sur l’univers politique de ce monde imaginaire, qui se résume à un palais sans vie, une librairie et deux-trois ruelles sombres.

Qu’il s’agisse de la construction bancale de l’histoire ou de l’écriture pauvre des dialogues, le scénario manque de matière et se complaît dans la paresse. Une minisérie de 7-8 épisodes aurait fait l’affaire. Entre les 4 épisodes d’introduction et le dénouement, on s’ennuie par conséquent royalement.

Réalisation : être obsédé par l’argent et avare d’émotions

Confiée à Baek Sang Hoon, qui occupait la place de second réalisateur aux côtés de Lee Eung-Bok dans Descendants of the Sun, et à Jung Ji Hyun qui a dirigé Search: WWW, la réalisation de The King: Eternal Monarch s’avère aussi plate que la plage interminable qui sépare ses deux mondes parallèles.

Quelques moments épiques surnagent bien ici et là, comme la scène clé durant laquelle le tout jeune Lee Gon manque de se faire tuer par son oncle au début de l’épisode 1, ou encore la séquence des cavaliers dans les rues désertes de Busan dans l’épisode 11. Néanmoins, le reste du temps, le drama s’appuie sur des effets carte postale pour tenter de nous faire rêver, à l’image de cet entre-deux mondes, justement, qui affiche des couleurs et des effets spéciaux d’un rare mauvais goût.

De même, les scènes plus intimistes se limitent la plupart du temps à de banals champ- contrechamp, le réalisateur échouant à créer la moindre tension dramatique, même lorsque le scénario en offre la possibilité : c’est le cas de la fameuse scène de la révélation manquée de Sin Jae à Tae Eul dans l’épisode 11, qui ne fait poindre aucune émotion.

Lee Gon s’extasie devant le BBQ Chicken de la République de Corée

Par ailleurs, si la photographie est classieuse dans les scènes de nuit, avec une belle utilisation des lumières et des couleurs, elle se révèle terne dans les scènes de jour, cédant à la tendance actuelle dans les dramas coréens, qui consiste à atténuer les traits et lisser les textures de peau.

Enfin, comment ne pas remarquer les placements de produits grossiers et incessants qui ponctuent les épisodes de The King: Eternal Monarch ? Le recours au placement de produits n’est pas une nouveauté dans les séries TV coréennes, mais quand celui-ci perturbe à ce point le visionnage, on peut parler d’un vrai problème.

La Première Ministre Koo en pleine réflexion sur le devenir du royaume

Entre le poulet BBQ Chicken, le Cellreturn LED mask, les bijoux J. Estina, le Bubble Tea taïwanais The Alley et j’en oublie, il ne se passe presque pas une scène sans que les quatre acteurs principaux vantent les mérites d’un produit de manière éhontée. Mieux, chacun d’entre eux se voit contraint de tester presque tous les produits : si Jung Eun Chae est la mannequin privilégiée du masque LED (une sorte de casque à la Daft Punk censé rajeunir la peau), Woo Do Hwan se retrouve également amené à l’essayer, et Lee Min Ho déclare fièrement s’en servir régulièrement !

Autant dire que sur ce plan, The King: Eternal Monarch bat même le drama Abyss, qui avait fait de Ahn Hyo Seop l’égérie de l’aspirateur Dyson et du café Dolce Gusto.

Romance : préférer la gourmandise à l’amour

Au début de The King: Eternal Monarch, Jung Tae Eul nous est présentée comme une flic téméraire et sûre de son coup, à la fois rompue à toutes les techniques d’arrestation, et effectuant des cascades au volant de sa voiture. Une fois devant ce roi prétentieux qui affirme venir d’un autre monde, elle ne se laisse pas démonter et met en doute chacun de ses mots. Mais ça, c’était avant.

En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, Tae Eul opère un virage à 180 degrés pour se métamorphoser en demoiselle en détresse qui pleurniche à tout bout de champ. Non seulement elle se révèle incapable de se sortir seule de la plupart des situations, mais passé un certain point, elle se met soudainement à sangloter dès qu’elle voit Lee Gon, alors que les deux « tourtereaux » n’ont pratiquement rien partagé à l’exception de quelques cuisses de poulet frit et un baiser volé.

Nous en revenons ainsi au syndrome sexiste de l’héroïne badass qui perd tous ses pouvoirs dès qu’elle est amoureuse.

A ce propos, il est assez caractéristique que le premier baiser de Lee Gon et Jung Tae Eul ne soit pas réellement consenti par la demoiselle. Située dans l’épisode 5 de The King: Eternal Monarch, la scène se déroule dans le royaume de Corea, dans la chambre de Sa Majesté : alors que tous deux sont adossés au lit, Lee Gon dépose soudainement un baiser sur les lèvres de Tae Eul qui reste sans réaction. Si les scènes de baiser volé peuvent s’avérer très sensuelles – souvenez-vous de Yoo Yeon Seok et Seo Hyun Jin dans Dr Romantic –, celle-ci tombe complètement à plat, mettant d’une part en exergue la position passive de Tae Eul dans la romance, et d’autre part le manque d’alchimie flagrant de Kim Go Eun et Lee Min Ho.

Après ce premier baiser, ne placez pas trop d’espoirs dans les scènes d’amour. Lee Gon et Tae Eul se montrent décidément plus gourmands quand il s’agit de déguster du poulet arrosé de soju au fast food du coin que lorsqu’il s’agit de flirter !

Personnages : envier les rôles secondaires

Les dramas de Kim Eun Sook doivent en partie leur succès à leurs personnages secondaires croustillants (le Grim Reaper dans Goblin, Gu Dong-Mae dans Mr. Sunshine, Choi Young Do dans The Heirs…). The King: Eternal Monarch vient majestueusement briser cette réputation.

Commençons par Jo Young et Eun Seop, campés tous deux par l’acteur Woo Do Hwan (My Country: The New Age). De tous les personnages du drama, Eun Seop est le plus réussi. Le collègue exubérant de Tae Eul est en effet le seul qui progresse au fil des péripéties, ce qui lui permet de découvrir sa propre valeur. Nous n’en dirons pas autant de Jo Young, le « Sabre incassable » de Lee Gon – terme honorable désignant sa position de plante verte dans le bureau du roi. Son passé se réduit au strict minimum (un ou deux dialogues à l’âge de 4 ans) et son amitié avec le roi, qui ressemble plutôt à une relation maître-esclave, est zappée.

Kim Kyung Nam n’est guère plus gâté que son collègue. Son personnage est celui qui porte la charge dramatique de l’histoire – son parcours brisé reflète le mal répandu par Lee Lim – mais ses apparitions sont sporadiques au point que l’on oublie parfois ce qui s’est produit dans la scène précédente.

Mais il y a pire : Jung Eun Chae (The Guest)… Première ministre du royaume de Corea, Koo Seo Ryeong souffre non seulement du manque d’intérêt de la scénariste pour l’univers politique du drama (où sont passés les autres ministres ?), mais aussi d’une vision arriérée des femmes dans la politique. Avec ses grands airs, la ministre Koo ne pense qu’à faire ses soins de beauté (par ici le masque LED !), à s’acheter des chaussures et à se faire épouser par le roi ! Bienvenue au 21e siècle.

Quant à l’acteur Lee Jung Jin (The K2), il réussit à insuffler une certaine aura au traître Lee Lim, mais là encore, on attendait un peu plus de complexité chez un homme qui assassine son propre frère au début de l’histoire. Ses interactions avec Lee Gon sont d’ailleurs trop rares et trop simplistes pour lui permettre de prendre la stature de grand méchant qu’il aurait dû avoir.

Enfin, est-il normal que les acteurs secondaires soient presque absents de certains épisodes vers la fin du drama ? Dans l’épisode 11, Woo Do Hwan se montre quelques secondes tout au plus. Quant aux personnages annexes (Na Ri, les collègues de Tae Eul…), ils disparaissent peu à peu des radars. Les acteurs secondaires auraient-il, chaque fois qu’une scène leur était réservée, suscité l’envie de la star du drama, au point d’être peu à peu écartés ?

Lee Min Ho : pécher par orgueil

Oui, Lee Min Ho est beau dans The King: Eternal Monarch. Peut-être trop. Tout au long des seize épisodes de la série, il ne se montre jamais avec une mèche décoiffée, même après avoir porté une casquette noire. Son teint étincelle continuellement (la magie du masque LED ?), tandis que le réalisateur prend soin de capturer son meilleur profil à tout instant. Même la scène invraisemblable de bataille navale de l’épisode 6 n’est que prétexte à nous le montrer glorieux en uniforme de la Marine.

Depuis les tenues luxueuses de notre souverain jusqu’à l’agencement des autres acteurs dans la composition des plans, tout semble organisé dans le seul but de sublimer la seule et unique star de The King: Eternal Monarch.

Lee Min Ho est ainsi comme ces actrices qui veulent perpétuellement être filmées sous leur meilleur profil, et qui sont prêtes à faire réarranger toute la scène pour y parvenir. Il ne s’autorise pas une grimace, pas une expression qui déformerait son précieux visage à l’écran. De fait, il ne donne jamais l’impression de s’investir dans son rôle. Lorsqu’il lui faut exécuter une scène de pleurs, il est filmé de loin, de sorte de n’avoir pas à se donner la peine d’éclater en sanglots face caméra.

Pour son premier projet après son service militaire, la superstar de The Heirs et de City Hunter a de toute évidence préféré sécuriser sa position : il a choisi une scénariste à hits, et un rôle lui permettant de rester dans sa zone de confort. Le résultat est qu’il prend toute la place à l’écran, sans donner grand-chose en retour au spectateur.

Si l’échec de The King: Eternal Monarch ne peut être entièrement imputé à Lee Min Ho, son orgueil a tout de même une part à y jouer. Il n’est plus qu’à espérer que l’accueil tiède du drama et de sa prestation en Corée du Sud lui permette de se remettre un peu en question.

Caroline & Elodie Leroy

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Kim Kyung Nam et Woo Do Hwan

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