Lee Kwang Soo est un caissier pas comme les autres dans ce polar humoristique qui tient en haleine grâce à une énigme bien entretenue.
Doté d’une mémoire hors du commun, Ahn Dae Sung (Lee Kwang Soo) occupe le poste de caissier dans la supérette MS Mart, dont sa mère Ahn Myung Sook (Jin Hee Kyung) est propriétaire. Sa petite amie, A-Hee (Kim Seolhyun), est policière de proximité au commissariat local. La découverte du cadavre d’une jeune femme bouleverse le quotidien tranquille du quartier. Le seul indice est un ticket de caisse de MS Mart, que le tueur a malencontreusement laissé derrière lui.
Critique du drama Les Courses du meurtrier
Diffusé en 2022 sur la chaîne câblée tvN, Les Courses du meurtrier (ou The Killer’s Shopping List) est enfin disponible en France depuis le 29 juillet 2025 sur Prime Video, deux ans après la sortie de son spin off, A Shop For Killers, sur Disney+. Si les deux dramas s’inspirent de romans de Kang Ji Young, celui-ci est écrit par le scénariste Han Ji Wan, à qui l’on doit le thriller tordu Somebody (Netflix), et dirigé par la réalisatrice Lee Eon Hee, qui a signé entre temps le long métrage Love in the Big City.
Le premier épisode des Courses du meurtrier s’attarde sur un moment marquant de l’enfance du protagoniste principal, qui assiste à l’agression de sa mère dans sa boutique par un marginal et contribue à le faire arrêter. La scène est à la fois comique, absurde et oppressante, annonçant le ton décalé qui prévaudra dans les épisodes suivants. A l’âge adulte, Dae Sung est toujours hanté par cet incident. Malgré ses qualités intellectuelles, il vient d’échouer pour la troisième année consécutive aux examens du service public. Ses angoisses sont réactivées par la réapparition de l’homme dans son quotidien. Dae Sung le soupçonne d’avoir un lien avec les meurtres dont le quartier est le théâtre et décide de mener son enquête en parallèle de celle de la police.
Reposant sur quête de l’identité de l’assassin, dont s’empare bientôt toute l’équipe de la supérette de MS Mart, l’intrigue du drama Les Courses du meurtrier ne réinvente pas le genre du polar, dont le scénariste Han Ji Wan maîtrise les ressorts – indices laissés ici et là, rebondissements bouleversant les conclusions tirées des événements précédents, émergence de plusieurs suspects – mais trouve son originalité dans le point de vue adopté dans cette enquête, celui des employés d’une supérette de quartier.
L’idée n’est pas si saugrenue qu’elle en a l’air. Après tout, les tueurs en série sont les premiers à étudier longuement la routine de leurs proies avant de passer à l’acte. C’est exactement ce que font Dae Sung et ses collègues en rapprochant les différents indices collectés – par exemple, l’odeur d’un produit ménager spécifique sur une scène de crime – des courses de leurs clients réguliers, dont ils connaissent parfaitement les habitudes.
Savamment entretenu, le mystère autour du tueur pousse le spectateur à se transformer en enquêteur en herbe depuis son canapé, Les Courses du meurtrier déroute néanmoins à plus d’une reprise par ses ruptures de ton. Le mélange entre polar, tranche de vie et comédie n’est pas inédit, mais le découpage fait parfois preuve d’audace en mettant en parallèle des scènes d’agression glaçantes avec des moments de comédie. Le drama aborde également des sujets graves comme les violences intrafamiliales, au milieu de séquences mâtinées d’humour noir. Ce style tout en contraste pourra dans un premier dérouter, mais passé la surprise, il participe au charme de la série.
Il faut dire que les acteurs font beaucoup pour la série. Dans le rôle de Dae Sung, Lee Kwang Soo, que l’on a vu récemment dans le thriller Karma, incarne à lui seul le côté « double face » de la série, dont il participe à définir le ton en amenant tour à tour du sérieux et de l’humour à froid dans son jeu. Il entretient également une bonne alchimie avec les autres acteurs, à commencer par Kim Seolhyun, dont le naturel sied parfaitement au style slice of life du drama, une qualité qu’elle montrait déjà dans Summer Strike.
Si l’actrice Jin Hee Kyung (Black Out) en fait parfois un peu trop en mère dévouée, elle forme un duo original et attachant avec Shin Sung Woo (Tempted), qui interprète son mari. Parmi les employés de MS Mart, Park Ji Bin (Bloody Heart) tire son épingle du jeu en poissonnier mystérieux, tandis que chez les clients, on retient surtout Ahn Se Bin (All Of Us Are Dead) dans le rôle de Yool, la petite fille pleine de ressources qui visite quotidiennement le MS Mart – les deux acteurs apparaissent également dans le spin off A Shop For Killers.
Les dramas coréens sont aussi réputés pour leurs acteurs secondaires capables de composer des personnages plus vrais que nature, qui pourraient être nos voisins, comme le font à la perfection Kim Mi Hwa (Good Partner) en fouineuse de service, Moon Hee Kyung (Battle For Happiness) en présidente de conseil syndical guindée, ou encore par Jang Won Young (Blackout) en marginal du quartier, toujours à la frontière entre le comique et l’effrayant.
Enfin, tout comme le roman coréen Les 4 enquêtrices de la supérette Gwangseon (Jeon Gunwoo) avec ses héroïnes femmes au foyer, Les Courses du meurtrier s’appuie sur l’idée que les figures de la vie de tous les jours, celles auxquelles ne faisons pas forcément attention, peuvent accomplir des choses extraordinaires. Ici, des employés de supermarché expriment leur attachement à leur clientèle, décèlent les drames qui se jouent dans les foyers, se muent en héros du quotidien capables de mettre en déroute un psychopathe avec leurs outils de travail. Un hommage insolite et touchant à leur métier.
Elodie Leroy
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