mercredi 1 octobre 2025

Mercy for None, sur Netflix : quand la violence sert uniquement la violence

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So Ji Sub dérouille ses ennemis avec flegme dans cette série aux scènes d’action choc, mais qui pâtit de l’indigence de son scénario.

Connu pour ses compétences de combattant, Nam Gi Jun (So Ji Sub) est l’ancien bras droit de Gu Bong San (Ahn Kil Kang), chef du gang Bongsan. Pour sauver son frère cadet Nam Gi Seok (Lee Joon Hyuk), employé du gang Ju Woon, il a dû tout quitter onze ans plus tôt après s’être sectionné le talon d’Achille.

Alors qu’il gagne modestement sa vie en tenant un petit commerce, Gi Jun reçoit la visite inattendue de son frère cadet, bras droit du chef de gang Lee Ju Woon (Heo Jun Ho), qui lui fait comprendre qu’il souhaite également raccrocher. Peu de temps après, Gi Seok meurt dans des circonstances mystérieuses. Gi Jun décide en conséquence de le venger en rejoignant de nouveau le monde du crime. Ses premiers soupçons se portent sur Gu Joon Mo (Gong Myung), le fils incontrôlable de Gu Bong San.

Sortie le 6 juin 2025, Mercy for None a rapidement atteint la seconde place du top 10 global des séries non anglophones de Netflix en se classant dans 44 pays. Une performance dynamique qui s’accorde parfaitement avec l’approche directe de Nam Gi Jun, un héros vengeur qui ne fait pas de quartier.

Adapté d’un webtoon de Oh Se-Hyeong (webcomic) et Kim Kyun-Tae (webcomic) publié sur Naver entre 2020 et 2021, Mercy for None est un drama d’action en sept épisodes écrit par Yoo Ki Sung et réalisé par le nouveau venu Choi Sung Eun (à ne pas confondre avec l’actrice du même nom). Au premier abord, la série évoque forcément le premier John Wick pour son esthétique flashy et la quête de son protagoniste qui se bat contre des hordes de malfrats pour venger la mort d’un proche sur fond de guerre des gangs.

En réalité, Mercy for None s’inscrit dans une longue tradition de films d’arts martiaux asiatiques qui suivent la trajectoire d’un héros solitaire et presqu’invincible tandis qu’il avance dans sa quête implacable contre des adversaires toujours plus puissants. On pense à des classiques comme La Fureur de Vaincre avec Bruce Lee et son remake Fist of Legend avec Jet Li, aux films thaïlandais Ong Bak et L’Honneur du Dragon, mais aussi à certains films de Chang Cheh tels que Vengance ! et surtout La Rage du Tigre, avec lequel Mercy for None partage de nombreux motifs : le combattant émérite qui s’auto-mutile à la suite d’un piège, le long retrait du monde des arts martiaux, la mort du frère (ici le frère biologique) qui sert de moteur à la vengeance et entraine le retour dans l’univers du combat, et le parcours sanguinaire qui mènera au véritable ennemi.

Le drama s’autorise également plusieurs références au film The Blade de Tsui Hark, remake du One-Armed Swordsman de Chang Cheh, lorsque le héros au pied bot se bat contre un adversaire manchot, ou lorsqu’il râpe cruellement la tête d’un gangster contre un mur.

Cette filiation constitue indéniablement le meilleur de Mercy for None, un aspect principalement concentré dans la première partie du drama, qui se révèle d’autant à la fois fun et efficace. Le réalisateur Choi Sung Eun soigne en particulier la dramaturgie de ses scènes d’action en insistant sur la dimension « undercover » de son héros. Le ton est donné dès la première scène de baston du drama située à la fin de l’épisode 1, durant laquelle Nam Gi Jun redresse à sa manière les bretelles d’une bande de délinquants décervelés. La séquence est d’autant plus cathartique que la brutalité des coups, assénés avec une expression placide par notre justicier, est judicieusement réhaussée par des bruitages élevés en volume.

Dans les épisodes qui suivent, Mercy for None réserve encore plusieurs moments forts de ce type, déchaînements de violence habilement chorégraphiés qui stimulent la fibre de redresseur de torts du spectateur. So Ji Sub, qui n’avait pas tourné de drama depuis Doctor Lawyer en 2022, se révèle parfait dans le rôle, auquel il imprime une véritable prestance tout en arborant un air perpétuellement désabusé. Il assure indéniablement dans les nombreuses scènes d’action, en particulier dans l’épisode 4 qui le voit affronter de nombreux adversaires en tous genres.

L’autre bonne surprise réside dans la performance de l’acteur Gong Myung, plutôt connu pour ses rôles de gentil garçon (Way Back Love, Citizen of a Kind, Drinking Solo) et qui endosse avec un visible enthousiasme le rôle de Gu Joon Mo, un caïd complètement dégénéré qui contribue au caractère imprévisible de la série.

Même s’il ne casse pas des briques (sans jeu de mot), Mercy for None s’affirme donc comme un divertissement sympathique dans sa première partie. Les choses se gâtent cependant à partir de l’épisode 5, c’est-à-dire dès que Gi Jun commence à accuser le coup de tous ces combats. Plus on avance, et plus il se traine lentement, freiné par les blessures qui s’accumulent, et ce, même si le scénariste lui prête une résistance hors norme s’il l’on fait le compte de celles-ci. Les scènes d’action deviennent en conséquence de moins en moins emballantes, quand elles ne sont pas tristement répétitives.

Dans le même temps, l’histoire n’en devient pas plus palpitante. On comprend vite que l’idée est de nous montrer que les chiens ne font pas des chats, et que ces chefs de gang engendrent forcément des progénitures à leur image. Le jeune procureur aux dents longues Lee Geum Son, fils de Lee Ju Woon, parait plus civilisé que son alter ego Gu Joon Mo, mais sa froideur n’est pas qu’une façade. Choo Young Woo (Trauma Code : Appel à l’héroïsme) apporte un certain mystère à ce rôle qui prend de l’importance au fil des épisodes, mais cela ne suffit pas à compenser le manque de développement de l’intrigue.

A ce stade, les personnages semblent en effet entrainés dans une spirale de plus en plus sombre qui atteint même un nihilisme malvenu pour un drama aussi peu substantiel dans son contenu. Mercy for None ne propose ni un parcours initiatique du protagoniste comme Fist of Legend ou The Blade, ni suffisamment de fun comme un Ong Bak pour pallier la simplicité de son scénario. On sort donc plus déçu que satisfait de cette aventure, voire lessivé comme Nam Gi Jun tandis qu’il avance tel un zombie sans véritable but.

On apprécie malgré tout de retrouver certaines têtes connues dans la peau de sombres ordures, comme Heo Jun Ho (Buried Hearts), Cha Seung Won (The Tyrant), Jo Han Cheol (La Créature de Kyŏngsŏng) ou encore Ahn Kil Kang (Sell Your Haunted House).

Caroline Leroy

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