Park Hyung Sik réclame vengeance dans ce thriller mélodramatique qui manque de substance et d’originalité, mais divertit grâce à ses rebondissements efficaces.
Secrétaire de l’ombre du grand groupe Daesan Energy, Seo Dong Ju (Park Hyung Sik) est sur le point d’épouser la petite fille du chef d’entreprise, Yeo Eun Nam (Hong Hwa Yeon). Au dernier moment, celle-ci le trahit pour épouser le neveu de Yeom Jang Seon (Heo Jun Ho), un ancien procureur richissime. Devenu la cible d’attaques, Dong Ju pirate avec succès la caisse noire constituée par le procureur Yeom, un butin qui s’élève à 3 milliards de wons. Ignorant que son argent a été piraté et que Dong Ju est le seul à connaître le code pour y accéder, celui-ci envoie un assassin pour l’éliminer.
Critique du drama Buried Hearts
C’est le succès surprise du premier semestre 2025 en Corée. Diffusé du 21 février au 12 avril sur SBS, Buried Hearts a connu une ascension spectaculaire, avec des ratings passés de 6,1 à 15,4 % (chiffres : Nielsen Korea). Il faut dire que tous les ingrédients sont réunis pour capturer le public : un argument de thriller teinté de vengeance, un scénario à rebondissements et une bonne dose de drame familial sur fond de chaebol.
Buried Hearts met tout de même un peu de temps à décoller. Le scénario de Lee Myung Hee (Money Flower) pose plutôt habilement les bases de l’histoire – la séparation choquante entre Dong Ju et Eun Nam, la naissance du conflit avec le producteur Yeom, les guerres intestines au sein de Daesan – mais les ressorts vus et revus de l’intrigue peinent à captiver. Le drama prend plus d’envergure à partir du premier rebondissement majeur, la tentative d’assassinat de Dong Ju, qui amorce un enchaînement d’événements funestes dans lequel s’entremêlent l’avidité, la jalousie et l’obsession du pouvoir.
Au fil des épisodes, Buried Hearts tisse un réseau de personnages qui se livrent à des stratégies complexes pour assouvir leurs désirs, quitte à céder à la corruption. La cupidité humaine est matérialisée par cet immense coffre-fort qui trône en face du bureau du PDG de Daesan Energy, Cha Gang Cheon (Woo Hyun), et dont tout le monde cherche à deviner le code d’accès. Ce bureau reçoit d’ailleurs de nombreux visiteurs venant flatter un patriarche qui n’hésite pas à marquer ses préférences entre les membres de sa famille, y compris ses enfants. Ces relations familiales toxiques mènent certains personnages à faire de mauvais choix, à se fier aux mauvaises personnes.
Seo Dong Ju est l’homme qui va bouleverser les plans des plus puissants. Si les intrigues de vengeance sont légion dans les dramas coréens, celle-ci n’est pas sans évoquer celle du roman français Comte de Monte Cristo d’Alexandre Dumas : un homme bafoué et laissé pour mort, dont même la petite amie a épousé un autre, revient avec plan machiavélique de longue haleine visant à prendre le pouvoir et faire tomber ses agresseurs, levant au passage le voile sur quelques secrets de famille.
Park Hyung Sik (Doctor Slump) prouve sa capacité à porter sur ses épaules un drama dont il est résolument le protagoniste central. Charismatique dans les face-à-face psychologiques, il apporte aussi beaucoup de nuances à l’évolution de Dong Ju qui découvre, en parallèle de ses plans machiavéliques, sa propre histoire familiale. On regrette seulement la romance ratée de Dong Ju avec Eun Nam, personnage cliché dont les apparitions (toujours accompagnées d’une petite musique au piano) ralentissent le rythme de l’intrigue et qui n’est guère aidée par l’interprétation fade de Hong Hwa Yeon (A son goût).
Principal ennemi du héros, le procureur Yeom Jang Seon est interprété par Heo Jun Ho (Mercy For None), qui parvient toujours à se renouveler dans ce registre – ses personnages de méchants ont toujours une gamme d’expressions et une démarche qui leur est propre. Véritable prédateur au pouvoir tentaculaire, Yeom est l’incarnation du Diable dans cette histoire : tous ceux et celles qui viennent lui faire une demande en ressortent corrompus à jamais, viciés de l’intérieur, comme s’il plantait une graine monstrueuse dans leur esprit pour les téléguider à distance. Son bureau se trouve dans une maison traditionnelle, ce qui accentue le sentiment d’avoir affaire à une puissance ancienne et indéboulonnable.
L’élément le plus intéressant de la série se situe cependant ailleurs, dans le face-à-face plein de rebondissements entre Dong Ju et Heo Il Do, gendre du PDG de Daesan, qui espère hériter de l’empire et qui s’est secrètement allié au procureur Yeom. L’acteur Lee Hae Young (Vigilante) délivre une interprétation étonnamment émotionnelle dans ce rôle de méchant, dont il traduit les conflits intérieurs avec profondeur (le réalisateur filme beaucoup son visage en très gros plan), au point de devenir le scene stealer de certains épisodes.
Le principal défaut de Buried Hearts réside dans la réalisation en dents de scie de Jin Chang Gyu (Military Procusecutor Doberman), qui navigue entre moments forts dans les scènes-clés (le sauvetage de Heo Il Do par Dong Ju dans l’épisode 4, la scène de l’accident de voiture dans l’épisode 11) et accumulation de scènes d’intérieur dans la maison de Cha Gang Cheon (Woo Hyun), qui confèrent à la série un cachet de soap opera.
On regrette également le manque de solidité de l’univers de la série, que la scénariste aurait gagné à travailler davantage. Il n’aurait pas été un luxe d’esquisser les enjeux business de la société Daesan, dont les mouvements d’actionnariat ne sont appréhendés qu’à travers le prisme des relations familiales du clan Cha, sans que l’on ne saisisse réellement l’activité de l’entreprise. Les luttes de pouvoir et les conflits affectifs auraient eu plus d’impact si l’ancrage de Daesan dans le monde extérieur avait été mieux défini.
On ne boude cependant pas son plaisir devant les rebondissements de scénario, qui refaçonnent constamment les relations entre les personnages, dont peu ressortent moralement irréprochables de cette histoire. On retient également un casting secondaire bien employé : Woo Hyun (Low Life) en patriarche attachant malgré ses abus de pouvoir, Hong Soo Hyun (Nursery Rhyme Horror Story) en femme d’affaire cupide et éternellement défavorisée par son père, Yoon Sang Hyun (Family By Choice) en petit frère innocent d’Eun Nam ou encore Lee Yoo Joon (My Sweet Mobster) en sauveur débonnaire de Dong Ju.
Le dénouement laisse quelques pistes de scénario inachevées, avec notamment un rebondissement de dernière minute qui a fait réagir le public. Espérons que cette fin controversée soit une amorce pour une saison 2, que nous regarderons sans hésiter si elle voit le jour.
Elodie Leroy
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