Lee Taemin et Shôta Matsuda font un bad trip chez Amazon Prime Vidéo dans ce manga live qui mérite une place de choix au royaume de Nanarland. Notre critique sans flash back.
L’annonce avait fait forte impression. A l’été 2017, nous apprenions avec un mélange de surprise, de curiosité et de délectation la sortie, le 8 septembre 2017, d’un web drama japonais intitulé Final Life, qui devait réunir l’acteur japonais Shôta Matsuda (Liar Game) et la star de K-pop Taemin du groupe SHINee.
Nous ne vous avons jamais caché notre passion pour le second, mais ce que vous ne saviez peut-être pas, c’est que le premier fait partie des acteurs japonais dont nous suivons la carrière depuis des années. Final Life avait donc des atouts pour nous attirer. Et puis, le temps est passé. L’actualité coréenne a été tellement chargée que nous avons constamment repoussé le moment de visionner l’objet. Un manque que nous avons récemment entrepris de combler.
Le moins que l’on puisse dire est que Final Life nous a prises par surprise, mais pas dans le bon sens du terme…
Vous attendiez de l’action avec Taemin ? Vous étiez prêts à ne pas être trop regardant sur le scénario, du moment que le divertissement était au rendez-vous ? Vous espériez soit une bromance soit un face-à-face choc, voire les deux, entre le danseur principal de SHINee et le charismatique Shôta Matsuda ?
Un conseil : tirez un trait sur ces espoirs… Final Life est l’un des dramas les plus soporifiques, les plus dénués de sens et finalement les plus vains que j’ai vus ces dernières années. Dans sa nullité abyssale, le machin exerce tout de même une certaine fascination.
Taemin sous Prozac
La première arnaque vient tout de même du personnage de Taemin…
Pour dire les choses clairement, il existe un fossé entre ce qu’Amazon Prime Video nous a vendu dans la bande-annonce, ou même dans le générique énigmatique de la série, et la réalité de ce que nous avons vu à l’écran.
J’ai illustré ce fossé à travers deux petits montages vidéo de mon cru en mode « expectation vs reality », spécialement conçus pour l’occasion…
En gros, la promotion de Final Life nous a vendu ça :
Oui, on nous a vendu du style, du badass, avec des beaux plans sur Taemin, exploitant son physique de danseur dans des scènes d’action très manga.
Dans les faits, nous avons eu ça :
Non, vous ne rêvez pas. Le beau, le gracieux, l’aérien Taemin n’a qu’une poignée de scènes d’action dans le drama. La vérité, c’est que notre virtuose de la danse K-pop passe le plus clair de son temps enfermé dans une pièce, à déambuler comme un zombie ou à se vautrer contre les murs, plongé dans une torpeur interminable.
Le personnage de Taemin semble montrer une affection particulière pour les murs, qu’il touche et caresse avec passion en regardant dans le vague… Il arrive qu’il évolue en extérieur, dans une ruelle sombre ou sur une plage, pour se traîner, là encore, contre un mur, ou bien s’effondrer sur le sable blanc…
Sacré Taemin, il nous a bien eues ! Mais faut-il lui en vouloir ? Quel pouvoir a-t-il eu sur le scénario ? Ses scènes ressemblent à une mise au placard par un réalisateur qui a préféré le mettre sur la touche plutôt que de payer un traducteur.
J’espère que Taemin, dont plusieurs titres sont utilisés dans le drama, a reçu un joli chèque pour se retrouver embarqué dans cette plaisanterie de 12 épisodes, dans laquelle il apparaît un peu comme le dindon de la farce.
Taemin a bien une ou deux scènes d’action par-ci par-là, dont une sympathique avec Shôta Matsuda dans l’épisode 6, mais le temps qui lui est accordé pour montrer son potentiel d’acteur d’action est on ne peut plus limité.
En conclusion, si vous cherchez donc un drama d’action dans lequel Taemin utilise sa souplesse et sa rapidité pour sublimer des scènes de combat, calmez-vous tout de suite ! Final Life vous donnera à manger dans le premier épisode, le temps d’une séquence clipesque où Taemin évite les balles d’un sniper en faisant quelques contorsions et en courant sur un terrain vague, et puis c’est tout. Affaire classée.
Taemin avec le cerveau d’Einstein
Mais au fait, de quoi parle Final Life ?
Final Life est donc l’histoire de deux hommes que tout oppose. L’un est issu d’un milieu pauvre, l’autre vient d’une famille riche. L’un est flic, l’autre est… On ne sait pas trop. Shi-On est venu au Japon pour mettre ses compétences exceptionnelles au service de la police japonaise, et plus précisément de l’équipe de Ryo Kawakubo, pour résoudre les affaires les plus difficiles. Au final, ils ne résoudront pas grand-chose, mais ils regarderont tous les jours intensément le tableau regroupant les indices, c’est déjà ça.
En réalité, Shi-On s’appelle Min Joon. Quand il était étudiant aux Etats-Unis, le jeune homme a été victime d’un kidnapping et d’une opération chirurgicale forcée. Ce qui nous vaut tout de même un plan de Taemin, inconscient sur une table d’opération, la tête secouée par les vibrations d’un outil chelou qui lui gratte l’intérieur du cerveau… Âme sensible de Shawol s’abstenir.
Rassurez-vous, Taemin… ou plutôt Min Joon, ou Shi-On, a tout oublié. Ou presque, puisque les souvenirs lui reviennent petit à petit pendant l’histoire. Et croyez-moi, ils reviennent vraiment petit à petit.
Nous revoyons pour ainsi dire quinze fois le même flash-back montrant Min Joon et sa copine, Kana, en plein pique-nique sur une étendue d’herbe, à l’ombre d’un arbre. Ce décor à lui seul est semble-t-il censé signifier que nous sommes sur un campus américain. Car, c’est bien connu, les étudiants américains passent leur temps à flirter sur l’herbe en chemise blanche.
Chose encore plus étrange, nous apprenons que Min Joon, qui a changé d’identité pour devenir Shi-On, s’est vu greffer des cellules clonées du cerveau de… Einstein ! Rien que ça.
Pour être honnête, je n’ai pas véritablement perçu d’éclair de génie chez ce personnage, si ce n’est dans cette séquence idiote où il est soudain possédé par le démon du clavier et parvient en moins de deux, avec l’ordinateur du commissariat local, à entrer dans le système de la CIA.
Shôta au volant de sa voiture
L’essentiel de l’« enquête » qui nous occupe, et qui met en scène, entre autres, un tueur de masse qui abat un certain nombre de personnes dans cette histoire, est donc mené de main de maître par Shôta Mastuda, alias l’inspecteur Ryo Kawakubo.
Shôta Matsuda aime bien tenter de nouvelles expériences avec des projets bizarres, comme il l’a déjà montré au cinéma (Afro Tanaka, Hard Romantiker) et récemment à la télévision (Dias Police vaut le détour !). Il affectionne également les rôles d’hommes peu sociables, comme son personnage culte de Liar Game, le génial Akiyama.
Cette fois-ci, Shôta Matsuda n’a pas fait un très bon calcul pour se mettre en valeur – sauf si Amazon paie bien, encore une fois.
Kawakubo n’est pas un type spécialement drôle au quotidien. Mais alors pas du tout. Passant le plus clair de son temps à fumer sa cigarette en regardant dans le vague ou à errer au volant de sa voiture (avec sa cigarette), Kawakubo n’est pas non plus le petit ami idéal pour Kana, jeune femme un peu cruche et blessée par la vie qu’il a sauvée d’une agression dans le métro.
Pour preuve que Kawakubo n’est pas le petit ami idéal, citons ce rencart très romantique dans un restaurant, où les deux personnages s’échangent à peine quelques mots. Alors que la jeune femme tente timidement de dégivrer l’atmosphère, notre policier pense intensément à la mort de son petit frère…
J’ai en effet omis de vous préciser un détail de l’histoire de Kawakubo : son petit frère et lui ont été abandonnés par leur maman quand ils étaient petits. La famine a eu raison du petit frère, que notre héros a dû enterrer lui-même au bord d’un lac.
Cette histoire tragique aurait pu apporter un peu d’émotion à Final Life si seulement ce flash-back ne nous avait pas été servi à répétition pour faire du remplissage. Au bout de la quinzième itération avec les mêmes dialogues et la même musique plaintive, croyez-moi, vous ne pourrez plus les voir en peinture, ces pauvres enfants !
A quoi nous mène cette histoire ? A rien, si ce n’est aux retrouvailles sans intérêt de Kawakubo avec sa mère, qui a échoué dans un appartement miteux avec un bon à rien qu’elle maltraite au quotidien, et qui sera bien entendu punie d’avoir été une aussi mauvaise mère.
Le calvaire des monteurs
Et Kana, dans tout ça ? Vous l’avez deviné, il s’agit précisément de la fille du passé de Shi-On, alias Min Joon, celle dont il voit à répétition la silhouette dans ses rêves et dont il entend de manière obsessionnelle la douce voix lui chanter une comptine pour enfant – au bout de deux ou trois fois, je vous garantis que vous ne pourrez plus supporter sa voix.
Ne rêvez pas trop sur la scène de baiser entre Taemin et l’actrice Miori Takimoto : il y en a une, mais vous ne verrez rien ! Là encore, nous sommes arnaquées…
Si les échanges en anglais entre les deux tourtereaux sur le campus américain font encore sourire rien que d’y penser, le scénario se révèle par ailleurs très économe en dialogues. La fumisterie des scénaristes explique certainement que les acteurs soient obligés d’improviser en déambulant dans une pièce fermée ou à fumer des clopes à répétition, adossés au coin d’une rue.
Je plains sincèrement les monteurs qui ont dû composer avec aussi peu de matière et étirer l’histoire sur 6 heures. Si je devais refaire le montage, le drama passerait facilement de 12 à 3 épisodes. Il peut largement se réduire à 1 heure 30 grand maximum.
On ne peut même pas accuser Taemin d’avoir fait sa diva en imposant des scènes à son avantage à chaque épisode, puisque le maknae de SHINee est obligé de jouer les zombies dans sa cellule le plus clair de son temps. Seuls les moments où Shi-On fait travailler son cerveau – et ces moments sont rares – le montrent prendre des pauses clipesques, tandis que des images lambdas évoquant les sciences défilent en mode stroboscopique.
Les monteurs ont donc été contraints d’avoir recours à de nombreuses scènes de remplissage pour combler les vides. Cerise sur le gâteau, non seulement Final Life ne raconte rien et ne va nulle part, mais le drama s’achève par le dénouement le plus pitoyable que j’ai vu depuis un bout de temps.
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L’esthétique au service du vide
Il faut tout de même reconnaître une qualité à Final Life : le soin apporté à l’image. L’histoire est complètement nonsensique, le développement des personnages répond aux abonnés absents, mais le drama offre quelques séquences clipesques jolies à regarder. On a d’ailleurs l’impression, dans certains épisodes, d’assister à un long clip sans interruption.
Les acteurs sont d’ailleurs à leur avantage : Taemin et Shôta Matsuda sont très beaux dans le drama.
L’épisode 10 comporte un plan très joliment éclairé où Shota Matsuda fume une cigarette, adossé à l’angle d’un bâtiment. Pendant qu’il finit sa clope, un technicien planqué hors champ s’amuse à allumer et éteindre un spot pour créer un effet avec le reflet de la vitre. A quoi ça sert ? Globalement à rien, si ce n’est à remplir un vide dans le montage, mais c’est joli à regarder (mais ça dure 30 secondes, ce qui est un peu long tout de même).
L’expérience est tout de même gâchée les flash-backs irritants cités plus haut, mais aussi par des effets douteux, tels que des balancements de caméra arrivant aux moments les plus incongrus et qui ne servent aucune émotion en particulier.
Plusieurs noms se succèdent à la réalisation. Le principal réalisateur crédité, Masatoshi Kurakata, semble être venu sur le plateau pour se livrer à ses petites expérimentations personnelles et surtout pas pour se soucier de ses acteurs, qui se retrouvent livrés à eux-mêmes, y compris quand le japonais n’est pas leur langue maternelle.
Faites gicler l’hémoglobine !
Final Life ne raconte strictement rien en 6 heures de bobine, mais réussit tout de même à accumuler un certain nombre de morts. Outre les découvertes macabres et extrêmement gore faites par les flics dans les premiers épisodes (les maquillages sont d’ailleurs réussis), deux scènes d’action font sérieusement monter le décompte de cadavres.
La première se déroule dans un hôpital, lorsque Shi-On, inconscient sur son lit de malade, est attaqué par un sniper. N’écoutant que son courage, Kawakubo s’élance vers son nouveau collègue et entreprend de l’évader par les couloirs… Je ne vais pas vous révéler comment le personnage de Taemin est sauvé, mais une chose est sûre, le sniper semble avoir un don d’ubiquité si l’on en croit le nombre de balles qui surgissent de divers endroits dans l’hôpital.
La seconde scène survient dans l’épisode 7 et s’impose comme l’unique bonne scène du drama. Elle se déroule sur un campus et met en scène un tueur de masse qui abat des dizaines de personnes. Intégralement tournée en plan-séquence et remarquablement orchestrée, la scène semble tout droit sortie d’un film indépendant américain des années 2000.
Le réalisateur de cet épisode, Ryuji Yagami, a-t-il voulu rendre un hommage au film Elephant de Gus Van Sant ? On ne sait pas très bien ce qu’un tel déchaînement de violence vient faire là, mais on aurait préféré que ce réalisateur garde les commandes du drama jusqu’à la fin.
Mais au fait, cet affrontement Taemin VS Shota Matsuda ?
Avec son intrigue fumeuse à en faire retourner Einstein dans sa tombe, Final Life nous laisse avec le sentiment d’avoir perdu 6 heures de notre vie à attendre un déclic qui ne vient jamais.
J’oubliais de préciser qu’il ne faut pas vous fier au générique, qui laisse penser qu’un affrontement titanesque opposera les personnages de Taemin et de Shôta. Ça, c’est juste pour le générique.
En vrai, leurs interactions se limitent à quelques mots échangés autour d’un barbecue et à un début de conversation sur un toit.
Il faut tout de même voir le gigantesque vent que se prend Taemin, quand il déboule sur le toit, devant Shota fumant sa cigarette, pour lui clamer son amour pour Kana, un éclair de défi dans les yeux… La réponse de Shôta ? Il lui recommande d’aller se reposer en lui tapotant gentiment sur l’épaule. Les scénaristes se sont bien moqués de nous !
Elodie Leroy
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