Découvrez notre critique d’Arahan, le film qui a fait connaître le réalisateur coréen Ryu Seung Wan à l’international.
Depuis des siècles, sept maîtres d’arts martiaux détiennent la clé qui permet d’accéder au Pouvoir absolu Arahan. A notre époque, cinq maîtres continuent de garder ce secret, jusqu’à ce qu’un sixième, qui les avait trahi en tentant de s’approprier le pouvoir, ressurgisse de sa prison. Sans le savoir, un jeune policier aussi maladroit que timide est leur seul espoir…
Peter Parker à la coréenne
Bien avant The Unjust et The Berlin Files, le réalisateur Ryu Seung Wan réalisait Arahan, un film d’action et de fantaisie qui a fait le tour des festivals internationaux. En France, le film a séduit le jury de la compétition Action du Festival du Film Asiatique de Deauville 2005, qui lui a décerné le Prix Action Asia. A la fois drôle, fantaisiste et très plaisant à regarder, ce manga-live mélange le film d’arts martiaux et le film de superhéros et démontre que le cinéma coréen peut largement rivaliser avec son voisin chinois en matière d’action inventive.
Le parcours de Sang-Hwan (Ryu Seung-Beom) évoquera inévitablement celui de Peter Parker dans Spider-Man (Sam Raimi) : timide, constamment à la traîne, Sang-Hwan n’est pas ce genre de héros qui trouve toujours la bonne réplique au bon moment. Sang-Hwan a tout d’un raté, de l’homme auquel personne ne fait attention, surtout pas une jolie fille. Et pourtant, le tabassage en règle qu’il subit de la part d’une bande de mafieux révèle chez lui une force précieuse s’il en est : celle de rester fidèle à ses principes.
Une comédie d’arts martiaux
Si vous recherchez un film d’arts martiaux sérieux, passez votre chemin : Arahan est une pure comédie. Réalisé par Ryu Seung-Wan, qui met en vedette son frère acteur Ryu Seung-Beom, Arahan n’est pas pour autant une farce désopilante comme pouvait l’être le Shaolin Soccer de Stephen Chow. Le film accumule les gags, mais l’intrigue suit le canevas des films d’arts martiaux classiques.
Dans Arahan, les arts martiaux n’ont pas uniquement pour fonction de créer du spectacle et de l’action. Ils sont véritablement au cœur de l’intrigue et jouent un rôle moteur dans l’évolution des personnages. En ce sens, on peut qualifier Arahan de véritable film d’arts martiaux. Et comme dans tout film d’arts martiaux qui se respecte, le plus important pour Sang-Hwan ne sera pas de réussir à battre les autres mais de parvenir à vaincre son ego, son orgueil.
Avec humour et candeur, Arahan transmet les valeurs des arts martiaux, rendant par la même occasion hommage aux mérites des travailleurs manuels, les seuls à utiliser pleinement le potentiel du corps humain, tout en affirmant qu’un maître sommeille peut-être en chacun de nous. Mais contrairement à nombre de films valorisant l’esprit des arts martiaux, Arahan ne prône pas le renoncement aux valeurs actuelles mais bel et bien l’adaptation à notre monde. Cette adaptation passe par la prise de conscience du passé par les jeunes, mais aussi par le passage de relais par les plus âgés à ces jeunes hommes et femmes.
Si Arahan fait passer un message progressiste, le film conserve du début à la fin un ton léger, n’hésitant pas à parodier les tics des films d’arts martiaux, comme l’apprenti qui s’exerce avec un objet du quotidien (en faisant la circulation!), ou sous une cascade.
Des scènes d’action made in Korea
Le film mise sur des scènes d’action efficaces et rythmées et prouve ainsi qu’il est possible pour les Coréens de rivaliser avec les films d’arts martiaux chinois sans faire appel aux talents de ces derniers – comme ce fut le cas, quelques années plus tôt, de Bichunmoo (Kim Yeong-Joon).
Quant nous parlons de scènes de combat dans une production coréenne, un nom vient immédiatement à l’esprit : Jeong Du-Hong. Vu dans Champion (Kwak Kyung-Taek), ce dernier a quelque chose à voir de près ou de loin avec à peu près tous les films coréens mettant en scène des chorégraphies, de Public Ennemy (Kang Woo-Suk) à No Blood No Tears (Ryu Seung-Hwan), en passant par Natural City (Min Byung-Chun).
Prenant directement part à l’action, puisqu’il interprète le bad guy tourmenté, Jeong Du-Hong signe ici des chorégraphies très dansantes lorsqu’elles font intervenir des câbles, violentes lors des affrontements plus terre-à-terre.
La bagarre du restaurant possède d’ailleurs une rage et une violence brute qui rappellera No Blood No Tears, qui avait l’audace de faire mettre en scène des femmes dans des bastons extrêmement brutales. Quant aux scènes plus fantaisistes de Arahan, elles emploient les câbles à bon escient car en accord avec l’évolution des pouvoirs des personnages.
Film d’action mêlant efficacement arts martiaux et effets spéciaux, le tout dans un esprit très comic-book, Arahan est aussi une comédie attachante portée par Ryu Seung-Beom (No Blood No Tears), attendrissant en héros malgré lui, et Yoon So-Yi (Shadowless Sword), convaincante en femme d’action au sens de l’honneur à toute épreuve. Un divertissement de qualité.
Elodie Leroy