La série japonaise Erased (Netflix)

Critique Erased : voyage dans le temps à la japonaise sur Netflix

Dans ce drama japonais fantastique, un jeune homme revient dans son corps d’enfant pour enquêter sur une affaire de meurtres en série. Notre avis sur Erased.

Netflix continue de remplir son catalogue de productions asiatiques ! Disponible intégralement sur la plateforme depuis le 15 décembre 2017, Erased est un drama japonais de 12 épisodes inspiré d’un manga de Kei Sanbe, et dont le scénario s’appuie sur le concept du voyage dans le temps pour nous entraîner dans une étrange quête de vérité autour d’une affaire de meurtres en série. Réalisé par Ten Shimoyama, Erased est un habile mélange de thriller à suspense, de mélodrame et de fantastique, mais aussi un hommage touchant à ces amitiés inoubliables qui ont marqué notre enfance.

Voyage dans le temps

Satoru Fujinuma (Yuki Furukawa), 29 ans, aspire à devenir dessinateur de mangas. Il possède également un étrange pouvoir, celui de revenir quelques minutes dans le temps lorsqu’un accident mortel est sur le point de survenir autour de lui. Un enchaînement d’événements dramatiques va le propulser 18 ans en arrière, dans le corps de ses 11 ans, à l’époque où un psychopathe tueur d’enfants sévit aux alentours de son école.

Le drama Erased s’inspire du manga du même nom de Kei Sanbe, qui était publié dans le magazine Young Ace de l’éditeur Kadokawa Shoten entre juin 2012 et mars 2016, et qui a déjà fait l’objet d’une adaptation en série animée en 2016.

Réalisée par Ten Shimoyama, à qui l’on doit notamment le long métrage de fantasy et d’action Shinobi, la série live Erased est produite par Kansai Telecasting Corporation et distribuée mondialement par Netflix. Le format est extrêmement facile à regarder puisque les 12 épisodes font à peine plus de 30 minutes chacun.

Le premier segment d’Erased nous invite à faire la connaissance de Satoru, qui gagne sa vie comme livreur de pizza en attendant son heure de gloire en tant que mangaka. Satoru est en réalité déjà désabusé. L’introduction nous le présente en situation d’échec, face à un éditeur moqueur qui explique sans détour que son œuvre est invendable.

En vérité, Satoru vit exactement le genre de vie dans laquelle toute personne animée par une passion (le dessin, pour Satoru) craint de se retrouver un jour enfermé : une vie banale et sans perspective de changement. Eteint, indifférent à son entourage, il semble vidé et se montre insensible aux attentions de sa mère, Sachiko (Tomoka Kurotani), et met du temps à comprendre les signaux envoyés par sa collègue Airi (Miyo Yuki), une jeune fille optimiste et toujours de bonne humeur.

La vie de Satoru bascule lorsque réapparaît le meurtrier qui avait terrifié sa ville natale dans son enfance. A l’époque, les adultes avaient choisi de faire en sorte que les enfants oublient le traumatisme de la disparition de plusieurs de leurs camarades de classe. L’enchaînement d’événements qui précède le bond dans le temps transforme le quotidien terne de Satoru en véritable cauchemar.

Accusé à tort du meurtre de sa propre mère, il se retrouve en cavale et ne peut faire confiance qu’à Airi, prenant le risque d’entraîner la jeune fille dans cette histoire. Lorsque Satoru se retrouve projeté dans le corps de ses 11 ans avec sa conscience d’adulte, il retrouve sa mère bien vivante, sa bande d’amis et l’univers de son enfance. Envahi par l’émotion, il saisit rapidement le sens de son voyage : empêcher une série de kidnappings et de meurtres d’enfants et découvrir l’identité du tueur en série.

A travers un scénario habile qui ne laisse rien au hasard, Erased développe un double récit navigant entre le passé et le présent, et qui déroule peu à peu son mystère sans jamais perdre en intensité. Le rapport entre passé et présent jette rapidement un trouble dans la perception du spectateur, puisque les deux époques sont reliées par la conscience de Satoru.

On se surprend ainsi à se demander si le présent n’est pas l’époque de ses 11 ans et l’autre période son futur potentiel. A la manière du personnage de L’Effet Papillon (Eric Bress, J. Mackye Gruber), film avec lequel Erased a quelques points communs, Satoru s’aperçoit rapidement que ses interventions dans le passé ont un impact sur le présent.

On se sent rapidement happé par le mystère qui entoure cette sombre affaire de meurtres, et saisi par l’atmosphère pesante qui se déploie tout au long de l’histoire. Les segments du passé sont les plus réussis, les plus mystérieux et les plus touchants, ne serait-ce que pour le contraste entre les décors froids et industriels de la ville enneigée, et la chaleur humaine qui se dégage de l’amitié entre les enfants ou des scènes de famille entre Satoru et sa mère.

Violence domestiques et harcèlement scolaire

La mémoire est bien entendu l’un des thèmes phares du drama, pas seulement d’un point de vue factuel, mais aussi d’un point de vue émotionnel et affectif. C’est en se reconnectant avec ses souvenirs d’enfance que Satoru pourra peut-être trouver la voie vers un avenir plus clément.

Le réalisateur Ten Shimoyama se montre très inspiré par les moments de bonheur partagés entre les enfants, s’attardant de manière contemplative sur leurs regards, comme dans ce goûter d’anniversaire au cours duquel Kayo, que Satoru tente de sauver d’une fin horrible, découvre la joie de recevoir des cadeaux.

La réalisation joue parfois de manière un peu trop appuyée sur le procédé des ralentis en musique, mais force est d’admettre qu’elle met véritablement l’emphase sur le caractère inoubliable, voire immortel, de certains souvenirs d’enfance. Erased saisit aussi l’importance des lieux dans ces souvenirs, comme le refuge au fond du bus, où la petite bande d’enfants se retrouve quotidiennement, ou l’arbre majestueux dans la montagne, que Satoru fait découvrir à Kayo. L’effet est réussi : ces moments laissent des images et des émotions dans la tête longtemps après le visionnage.

A ces moments de bonheur s’oppose l’affaire glauque de meurtres en série qui obsède Satoru, dans le passé comme dans le présent. Je ne dévoilerai pas l’identité du psychopathe, mais il devient vite évident que le tueur vise en priorité des enfants qui se trouvent, à un moment de leur vie, en situation d’isolement. Victimes de violence domestiques ou de harcèlement scolaire, voire les deux, les enfants subissent d’abord une sorte de mort sociale avant d’être tout bonnement et simplement effacés de la surface de la terre, se réduisant des années plus tard à des photos dans un cold case.

Le besoin de créer des liens sociaux et affectifs est l’autre thème phare d’Erased, qui ne tient pas pour autant un discours moralisateur sur les personnes socialement défavorisées. Les images de cette ville parsemée d’usines en activité et plongée dans un froid glacial omniprésent se suffisent à elles-mêmes.

Plusieurs éléments du casting tirent leur épingle du jeu, notamment la jeune Rinka Kakihara dans le rôle touchant de Kayo, dont le manteau n’est d’ailleurs pas sans évoquer le petit chaperon rouge, mais aussi Tomoka Kurotani (également dans Shinobi) dans le rôle de la mère de Satoru. Les deux acteurs qui interprètent Satoru, Yuki Furukawa en adulte et Reo Uchikawa en enfant, réussissent quant à eux à porter tour à tour le drama sur leurs épaules et à nous embarquer dans la quête du personnage.

N’ayez crainte, Erased donne largement satisfaction quant à la résolution du mystère grâce à un scénario d’une grande cohérence. Une série émouvante et pleine de suspense que je vous recommande chaudement.

Elodie Leroy

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