Ji Chang Wook (The K2)

Critique The K2 : Ji Chang Wook en héros d’action romantique

Les scènes de combat en imposent dans ce thriller coréen d’action, où Ji Chang-Wook protège la fille d’un homme politique.

Après l’excellent Healer, Ji Chang Wook poursuit dans le registre de l’action avec la série TV The K2, un thriller diffusé sur tvN en 2016 et disponible sur Netflix depuis fin 2019. Doté d’un budget confortable, The K2 offre un cocktail sympathique d’action, de politique et de romance. Les amateurs d’affrontements martiaux seront comblés : la série affiche de belles qualités de production et assure le divertissement avec des scènes de combat brutales et spectaculaires. Sur le plan du scénario, le drama s’avère plus inégal, mais on se laisse volontiers happer par les relations tumultueuses entre les personnages, dont la dynamique s’inspire directement du conte de Blanche-Neige.

The K2 : Ji Chang Wook et YoonA

La rencontre de deux fugitifs

The K2 commence sur les chapeaux de roues. Traumatisée par la mort de sa mère, une petite fille est abandonnée dans un couvent au fin fond d’un pays, l’Espagne, dont elle ne connaît ni la langue ni la culture. Dénuée de dialogues, portée par des chœurs lyriques, cette introduction énigmatique est baignée dans une ambiance crépusculaire aux allures de conte de fées.

La suite se déroule une dizaine d’années plus tard. La petite fille est devenue adulte et vient de s’échapper de sa prison. Paniquée, hirsute, Go Anna (Im Yoona) est poursuivie par des hommes inquiétants et court pieds nus dans la cité. Pendant ce temps, un homme se réveille couvert de sang dans une chambre d’hôtel miteuse. Ancien mercenaire accusé à tort d’avoir tué des civils en Irak, Kim Je Ha (Ji Chang Wook) a trouvé refuge en Espagne.

Ji Chang Wook (The K2)

Lorsque les deux fugitifs se rencontrent dans un couloir de métro, la jeune femme supplie son compatriote de lui venir en aide. Kim Je Ha la protège d’abord de ses ravisseurs, mais finit par l’abandonner à son sort malgré ses supplications.

Quelques mois plus tard, Kim Je Ha est de retour en Corée, où il enchaîne les petits boulots payés à la journée. Témoin accidentel de l’adultère de Jang Se Joon (Jo Sung Ah), un député en lice pour les présidentielles, il devient la proie d’une armée privée aux méthodes expéditives. Mais il finit par impressionner l’épouse de Jang Se Joon, Choi Yoo Jin (Song Yoon-Ah), qui le recrute comme garde du corps.

Kim Je Ha reçoit un nom de code : « K2 ». Sa mission ? Protéger et surveiller Anna, fille illégitime de Jang Se Joon dont l’existence doit rester secrète.

Im Yoona (The K2)

Le premier blockbuster de tvN

En 2016, les blockbusters d’action sont encore rares à la télévision coréenne et sont l’apanage des chaînes nationales (KBS, MBC et SBS). Diffusée sur tvN entre le 23 septembre et le 12 novembre 2016, la série The K2 est une manière, pour la chaîne câblée, d’afficher ses intentions de rivaliser avec les grandes chaînes sur le terrain des dramas à gros budget – aujourd’hui, des productions de grande envergure sont régulièrement diffusées sur tvN (Goblin, Mr. Sunshine…).

Produite par Studio Dragon, cette série réalisée par Kwak Jung Hwan (Miss Hammurabi) et écrite par Jang Hyeok Rin (Yong Pal) n’est pas exempt de défauts, mais s’impose comme une production bien emballée, boostée par des scènes de combat énergiques et portée par un couple d’acteurs glamour – Ji Chang Wook et Im Yoona.

Cocktail de scènes d’action

Dès le premier épisode, The K2 affiche une certaine générosité avec ce qui constitue l’une de ses attractions majeures : les combats. Sur le quai du métro espagnol, dans un gratte-ciel de Séoul ou dans un entrepôt abandonné, tout est prétexte à envoyer des scènes de baston inventives et musclées. A l’exception de quelques effets bullet time* (jeu sur la vitesse des images mis au point dans Matrix) qui peuvent laisser sceptique dans l’épisode 2, les affrontements martiaux s’avèrent efficaces, brutaux et facteurs de suspense, exploitant des décors variés avec un savoir-faire incontestable.

Il faut dire que Kim Je Ha montre une aversion pour les caïds qui oppriment les personnes socialement vulnérables et n’hésite pas à mettre en pratique ses talents exceptionnels de combattant – nous apprenons rapidement qu’il a fait les Forces spéciales.

Ji Chang Wook combat dans The K2

A ce titre, l’investissement physique de Ji Chang Wook (Healer) force le respect : utilisant des techniques de Taekwondo, de Jiu-jitsu ou encore d’Aikido, l’acteur exécute avec précision des chorégraphies complexes et prend des poses de combat acrobatiques le temps de ralentis savamment disséminés dans le montage. Ses mouvements sont rapides et les chocs d’une grande violence, ce qui témoigne d’une étroite collaboration avec les cascadeurs. Il est à noter que Ji Chang Wook réalise toutes ses cascades lui-même dans les combats.

La meilleure scène d’action est certainement celle qui oppose Kim Je Ha à un groupe d’ouvriers de chantier dans l’épisode 15, un combat ultraviolent dont la rage et le parti pris visuel, qui joue sur de superbes contrastes, ne sont pas sans évoquer la scène culte de l’évasion dans le film A Bittersweet Life (Kim Jee Woon).

Mise en scène de la politique

Sur le plan de l’action pure, The K2 tient donc haut la main ses promesses. Mais qu’en est-il du scénario ? Sur ce plan, notre verdict est plus nuancé. A condition d’être bon public, l’histoire reste accrocheuse jusqu’au bout et offre son lot de rebondissements, mais il est difficile de passer outre certaines faiblesses d’écriture.

Le principal défaut de The K2 tient peut-être aux ambitions trop élevées du scénario. Il fallait oser vouloir mener de front une intrigue politique, un drame familial et une romance sur fond de triangle amoureux, tout en réservant une place conséquente aux scènes d’action. L’idée est sympathique sur le papier, mais en pratique, certains arcs scénaristiques restent en surface de leur sujet.

Song Yoon-A (The K2)

Le set up de Kim Je Ha, par exemple, aurait mérité d’être élaboré avec plus de sérieux. Dévoilé au travers de flash-back censés se dérouler en Irak, le passé du héros reprend le cliché du premier amour disparu dans des circonstances tragiques… Non seulement le personnage féminin est difficile à prendre au sérieux (l’actrice n’est pas convaincante une seule seconde), mais leurs échanges romantiques sont dénués de poésie visuelle et semblent avoir été réalisés à la va-vite. Ces flash backs constituent le vrai dérapage de la série.

L’intrigue politique de The K2 ne révolutionne pas le genre, mais parvient à nous tenir en haleine en orchestrant un duel sans merci entre Jang Se Joon et son rival Park Kwan Soo (Kim Kap Soo), qui se montre prêt à tous les coups bas pour remporter la course aux présidentielles. L’écriture du bad guy est caricaturale, mais le drama a tout de même l’audace de soulever la question épineuse du financement des campagnes politiques par des organisations terroristes.

Im Yoon-A et Ji Chang-Wook

Le versant politique du scénario s’attarde également sur le lien étroit entre le monde politique et celui des affaires à travers le mariage d’intérêt de Jang Se Joon et Choi Yoo Jin. The K2 n’est pas la première série coréenne à explorer ce sujet (il était au cœur du drama The Chaser, notamment), mais il s’intéresse aussi à la mise en scène de la vie privée des personnalités politiques dans les médias, qui est souvent à mille lieues de la réalité.

Triangle amoureux et conflit de femmes

Au milieu de ces enjeux politiques traités avec maturité, la romance de Kim Je Ha et Anna paraît trop naïve et prévisible. Lorsque les deux jeunes gens se rencontrent, ils paraissent tous deux égarés dans un monde impitoyable. La confrontation de leurs deux histoires promet beaucoup d’intensité, mais la romance s’affadit au fil des épisodes, comme si l’amour en lui-même n’intéressait que très modérément le scénariste.

Cette romance brille tout de même, à ses débuts, par quelques scènes fortes. Nous pensons à ces moments de pur voyeurisme où Je Ha observe en secret les activités nocturnes d’Anna à travers les caméras de surveillance, ou encore ce premier baiser sous forme de bouche-à-bouche qui conclut l’épisode 6.

Tant que leur relation reste ambiguë, l’histoire d’Anna et Je Ha séduit les romantiques que nous sommes. Une fois leurs sentiments déclarés, les moments de bonheur ne sont pour ainsi dire pas renversants. On s’étonne d’ailleurs qu’Anna puisse se laisser aller aussi facilement à la légèreté compte tenu de son passé et de sa phobie sociale.

더 케이투

Les interactions entre le héros et la charismatique Choi Yoo Jin sont autrement plus excitantes. Il faut dire que la méchante de l’histoire s’impose comme le personnage le plus complexe et le plus intéressant du drama.

Sa rencontre avec Kim Je Ha, qui survient dans l’épisode 2, est chargée de tension érotique : le regard intense, le jeune homme la plaque au mur et en braquant sur elle une arme à feu (un symbole phallique !), avant d’être interpellé par Anna, qui se tient derrière son dos et lui crie d’appuyer sur la détente. Pris en sandwich entre les deux, le jeune homme paraît soudain submergé par ces femmes pleines de passions destructrices, prêtes à l’engloutir dans leur conflit intergénérationnel.

Song Yoon-A et Ji Chang Wook (The K2)

Interviewé par Top Star News, Ji Chang Wook a fait part de la différence d’atmosphère entre ses scènes avec les deux actrices : « L’atmosphère était lumineuse pendant les scènes romantiques avec Mlle Im Yoona, mais les scènes que j’ai tournées avec Song Yoon Ah sunbae étaient très tendues. Dès que le tournage commençait, je me concentrais sur le maintien de cette tension. »

Blanche-Neige, la sorcière et le K2

A propos de conflit intergénérationnel, la distribution des rôles entre les personnages principaux n’est pas sans rappeler un célèbre conte de fées : Blanche-Neige.

Atteinte de phobie sociale, Anna est la princesse endormie et enfermée dans un château, tandis que Jang Se Joon prend le rôle du roi (il aspire à devenir président de la république) et Choi Yoo Jin celui de la méchante reine, cette sorcière jalouse de l’innocente jeune fille. Vous l’aurez compris, Kim Je Ha tient le rôle du chasseur, ce mercenaire envoyé par la reine tuer la princesse, mais qui décide de l’épargner.

L'acteur coréen Ji Chang-Wook

La référence avec Blanche-Neige est explicite dès l’épisode 2, lors d’une scène où Choi Yoo Jin, qui vient de tourner une interview télévisée, se trouve seule avec son assistante dans sa loge. Se contemplant dans le miroir, elle remarque quelques rides et demande à son assistante l’âge d’Anna.

Par la suite, nous découvrons qu’elle espionne ses opposants dans une pièce secrète par le biais d’un super ordinateur qu’elle appelle Miroir, et qui a la faculté de pirater les caméras de surveillance du monde entier. Devant Miroir, Choi Yoo Jin est omnipotente, narcissique et se laisse aller à sa quête du pouvoir.

The K2 modernise de manière intéressante le conte de fées, en dynamitant quelques codes de la société patriarcale. Ainsi, la marâtre n’est plus une intrigante, mais l’épouse légitime du roi et celle qui détient la fortune lui permettant de mener une carrière politique. Le père, quant à lui, n’est plus victime d’une perverse narcissique, mais bel et bien responsable de la maltraitance de sa fille, qu’il laisse entre les mains de son épouse par lâcheté.

Kim Je Ha (Ji Chang Wook) de The K2

A ce propos, il s’avère bien difficile de prendre parti dans le conflit qui oppose Choi Yoo Jin et Jang Se Joon. Ce drame conjugal, dont l’écriture est l’une des réussites du drama, met sur un pied d’égalité les deux points de vue à travers le regard de Kim Je Ha, qui gagne leur confiance à tous les deux et reçoit leurs confidences.

Ji Chang Wook, la star d’action romantique

En somme, si la romance aurait gagné à être plus travaillée, The K2 parvient à imbriquer plusieurs intrigues politiques et familiales avec une certaine habileté, offrant des rebondissements et des moments de tension psychologique jusqu’au bout. Ces moments de tension, nous les devons à une mise en scène qui sait mettre l’emphase sur la tension dramatique, mais aussi à un casting judicieux.

En plus d’exceller dans les scènes d’action, Ji Chang Wook est aussi très bon acteur. En d’autres mains, son personnage se résumerait au cliché de l’homme protecteur, mais il lui apporte un mélange paradoxal de force brute et de douceur. Ji Chang Wook trouve le ton juste dans chaque scène, que ce soit dans les échanges houleux entre Kim Je Ha et Choi Yoo Jin, dans les moments romantiques avec Anna ou même dans les scènes d’action.

Les bons acteurs d’action sont reconnaissables par leur capacité à rester habités par leur personnage, même lorsqu’ils se donnent à fond pour effectuer des prouesses physiques. Comme un Lee Seung Gi dans Vagabond ou un Yang Se Jong dans My Country, Ji Chang Wook possède cette capacité à maintenir la tension dramatique pendant les affrontements martiaux, grâce à un regard intense et un langage corporel développé. En bref, le personnage de Kim Je Ha n’est pas le plus fouillé de sa carrière, loin de là, mais Ji Chang Wook est absolument parfait en héros d’action romantique !

Scène d'action avec Ji Chang Wook

Aujourd’hui, Ji Chang Wook semble s’orienter vers des rôles physiquement plus reposants, comme le loufoque Melting Me Softly et le récent Backstreet Rookie. Et si nous sommes ravies de le voir explorer d’autres registres, il ne fait aucun doute que son retour vers celui du thriller d’action est fortement désiré par ses fans.

Song Yoon Ah épatante en manipulatrice charismatique

Quant à Im Yoona, dont les débuts d’actrice nous avaient laissés dubitatifs (on se souvient des soporifiques Cinderella Man et Love Rain), force est de reconnaître qu’elle avait déjà, à l’époque de The K2, fait énormément de progrès.

Issue du groupe de K-pop emblématique SNSD, alias Girls’ Generation, Im Yoona a repris le chemin des études pour perfectionner son jeu d’actrice à l’université de Dongguk, dont elle est diplômée depuis 2015. Dans The K2, elle se montre convaincante dans les scènes émotionnelles au cours desquelles Anna est gouvernée par ses traumatismes, ainsi que dans les échanges touchants entre la jeune femme et son père.

Ji Chang Wook et Yoona

Le personnage de Song Yoon Ah (Secret Mother) demeure cependant le pilier de l’univers de la série. Le ton du drama dépend d’ailleurs en partie des humeurs de Choi Yoo Jin et des épreuves qu’elle traverse.

Charismatique et subtile, l’actrice excelle dans ce rôle flamboyant qui révèle de multiples facettes, de l’épouse blessée à la manipulatrice froide, en passant par la séductrice vénéneuse. Sa relation trouble avec Kim Je Ha lui apporte une dimension supplémentaire en tant que femme : tour à tour dominante et dominée, Choi Yoo Jin laisse entrevoir son vrai visage devant cet homme qui résiste à son pouvoir.

Avec son regard impénétrable, Jo Sung Ah (100 Days My Prince) fait comme toujours des étincelles dans un registre qui lui est familier, celui du politicien manipulateur et cynique. Jang Se Joon échappe pourtant à la caricature et gagne relief à mesure qu’il laisse apparaître ses failles, ses regrets, notamment à travers sa relation avec sa fille.

The K2 : Song Yoon-Ah

Parmi les rôles secondaires, on retiendra également Lee Jung Jin (The King : Enternal Monarch) dans le rôle du demi-frère roublard de Choi Yoo Jin, Kim Kap Soo (Whisper) en politicien véreux, Shin Dong Mi (Hi Bye, Mama!) en secrétaire qui semble avoir des sentiments homosexuels envers sa patronne, mais aussi Lee Yea Eun (Duel) dans le rôle de la garde du corps rigolote qui se persuade que Kim Je Ha est amoureux d’elle.

Vous l’aurez compris, The K2 est un divertissement honnête qui présente à la fois de gros défauts et de grandes qualités. Une chose est sûre, si vous aimez les scènes de combat, n’hésitez pas à vous lancer !

Pour finir, nous vous encourageons à écouter la superbe bande originale de The K2, qui met à l’honneur la langue allemande et dont les titres confirment notre lecture à la lumière du conte de Blanche-Neige (« The Witch and the Girl », « Mirror Mirror », « Wolf Knight », etc.).

The K2 est disponible sur Netflix depuis octobre 2019.

Elodie Leroy

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