Critique : Voice 2, une suite sans saveur avec Lee Jin Wook

par Caroline Leroy

Le drama Voice 2 mise sur la surenchère pour pallier un scénario en pilotage automatique. L’arrivée de Lee Jin Wook au casting n’atténue pas la déception.

Voice 2 était l’un des thrillers coréens télévisés les plus attendus de l’année. Réunissant Lee Ha Na et Lee Jin Wook, cette suite met les bouchées doubles en matière d’action et de rebondissements. Au final, Voice 2 confine davantage au produit de commande qu’à un beau cadeau destiné aux fans de Voice. Scénario puéril et prévisible, réalisation impersonnelle, montage hystérique, le drama déçoit sur tous les tableaux ou presque. Il n’est même pas sauvé par ses (bons) acteurs, et ce même si Kwon Yool sort du lot avec une prestation sympathique.

Lee Ha Na et Lee Jin Wook dans Voice 2

Kang Kwon Joo (Lee Ha Na) conserve son poste à la tête de l’Equipe Golden Time, qui traite les appels d’urgence des victimes de violence. Suite à la mort inexpliquée de son patron, elle recrute un nouveau partenaire, l’inspecteur Do Kang Woo (Lee Jin Wook). Celui-ci est réputé pour sa capacité à interpréter les preuves sur la scène de crime, mais son passé trouble et son caractère instable lui valent beaucoup d’ennemis. Kwon Joo et Kang Woo devront s’allier pour déjouer les manigances d’un tueur en série qui semble avoir pris leur équipe pour cible.

La chaîne câblée OCN est l’une des rares à proposer régulièrement des dramas s’étalant sur plusieurs saisons. Succès instantané, Voice inaugurait il y a bientôt deux ans le fantastique line-up de thrillers offert par la chaîne pendant toute l’année 2017. Il n’est guère étonnant que les producteurs aient eu envie de creuser le filon, d’autant que son principe procédural s’y prête tout particulièrement.

Et c’est ainsi que Voice 2 anime les week-ends d’OCN entre le 11 août et le 16 septembre 2018. La production fait de nouveau appel à la scénariste Ma Jin Won (Save The Last Dance For Me), dont le travail sur la première saison se distingue par un équilibre réussi entre polar à suspense teinté de chronique sociale, et chasse musclée au serial killer.

L’actrice Lee Ha Na (Unkind Ladies) reprend elle aussi du service dans le rôle emblématique de la flic Kang Kwon Joo, à l’acuité auditive légendaire. Le réalisateur Kim Hong Sun délaisse en revanche l’équipe Golden Time pour aller frayer avec les forces occultes sur The Guest. Pas d’inquiétude a priori, puisqu’il est remplacé par Lee Seung Young, valeur sûre de la chaîne – on lui doit Missing Noir M et les deux premières saisons de Special Affairs Team TEN.

L’autre désistement de taille vient de l’acteur principal de Voice, Jang Hyuk, qui cède la place à Lee Jin Wook pour faire son retour sur MBC dans Bad Papa. Un choix dont il s’est peut-être au moins une fois mordu les doigts au vu du score d’audience de Voice 2, qui se classe rien moins que parmi les plus gros succès d’OCN avec 4,931% de parts de marché, et un dernier épisode à plus de 7%.

Mais comme chacun sait, qui dit carton d’audience ne veut pas forcément dire œuvre de qualité, et Voice 2 est là pour nous le démontrer à chaque instant. Dès l’ouverture de l’épisode 1, qui dépeint la première confrontation entre le flic Do Kang Woo et son dangereux ennemi, Voice 2 met à mal nos espoirs. La séquence, très convenue, est platement mise en scène et se voit accompagnée d’une musique bourrine omniprésente. Le méchant est caricatural à souhait derrière son masque tape-à-l’œil.

On est loin de l’entrée en matière choc de Voice, de son suspense lancinant et de l’effroi provoqué par le meurtre bestial que commet sous nos yeux le personnage de Kim Jae Wook.


Les ficelles de l’intrigue de Voice 2 sont grossières et prévisibles. La réalisation joue constamment sur la surenchère pour nous maintenir devant l’écran, comme si seule l’action non-stop pouvait justifier cette deuxième saison. Le rythme de Voice 2 est si effréné qu’on a à peine le temps de souffler pendant et entre les scènes, avec pour effet qu’il n’émerge aucune montée d’adrénaline de ce capharnaüm sonore et visuel.

Quant aux personnages principaux, ils sont à peine esquissés. L’arrivée d’un nouvel acteur aurait dû stimuler la dynamique du duo entre Kang Kwon Joo et son homme de terrain. Mais c’est l’inverse qui se produit. Comme on connaît déjà le passé de Kwon Joo et que son problème est supposé « résolu » depuis Voice, la scénariste n’a pas cru bon de lui créer de nouveaux enjeux personnels.

L’actrice Lee Ha Na se retrouve de fait complètement mise sur la touche par rapport à son nouveau partenaire. Elle ne se voit accorder le droit de prendre des initiatives que lorsqu’il est question d’enfant (épisode 4). Mis à part cela, ses seuls sujets de préoccupation concernent exclusivement le personnage de Lee Jin Wook, sans qu’elle ait pourtant le temps de rien partager avec lui sur le plan humain. Propulsé star instantanée de Voice 2, Lee Jin Wook (Goodbye Mr. Black) fait bien son boulot, malgré le set-up banal de son personnage. Heureusement, dirons-nous.

Car Do Kang Woo occupe tout l’espace, à l’écran comme dans les pensées de tous les autres protagonistes. Du début à la fin du drama, seule son histoire personnelle compte. Il est de toutes les scènes d’action, ce qui ne l’empêche pas de résoudre aussi la plupart des affaires. Face à un tel homme, on se demande à quoi sert encore l’ouïe extraordinaire de Kwon Joo.

Malgré tout, celui qui tire le mieux son épingle du jeu dans cette histoire, n’est autre que Kwon Yool. Son personnage de méchant est complètement stéréotypé, contrairement au psychopathe de Voice, et il ne passe pas non plus souvent à l’action. Acteur spécialisé dans les rôles de méchants (il faut le voir dans Whisper et surtout Let’s Fight Ghost!), Kwon Yool parvient néanmoins à nous surprendre, et force est de constater qu’il nous sauve plus d’une fois de l’ennui.

Car le manque de substance de Voice 2 se ressent aussi dans la façon dont sont traitées les différentes affaires. Si celles-ci restent majoritairement ancrées dans les milieux défavorisés comme c’était déjà le cas dans Voice, les maigres tentatives pour aborder des sujets de société échouent ici lamentablement.

L’un des exemples les plus affligeants en est le duo d’épisodes 8 et 9, où la collègue de longue date de Kwon Joo, Park Eun Soo (Son Eun Seo, déjà dans Voice), se révèle subitement être une femme battue. Son ex-petit ami vient la harceler jusqu’au commissariat, un comble pour quelqu’un qui est supposé être un psychiatre renommé.

L’acteur Jae Hee (Sassy Girl Chun Hyang) ne brille pas par la subtilité de son interprétation, mais le plus grave est que l’approche irréaliste du thème des violences conjugales n’est finalement qu’un prétexte à montrer la stoïque Eun Soo se faire violenter par un homme.

A ces thèmes bâclés s’ajoutent des invraisemblances ahurissantes, comme dans cette scène de l’épisode 4 où un suspect est laissé sans surveillance dans une salle de réunion. Pendant qu’il se fait trucider, tous les flics se pressent mollement derrière la porte close pour essayer d’entrer, jusqu’à ce que l’un d’entre eux se rappelle qu’il avait la clé dans sa poche depuis le début.

Au rayon des absurdités, nous avons aussi le cas de l’indestructible Do Kang Woo, qui court partout alors qu’il est grièvement blessé à l’abdomen. Son énergie est telle qu’il monte à toute allure les escaliers d’un immeuble jusqu’au toit, tout en dégommant ses collègues sur son passage. Après s’être reposé une heure à peine à l’hôpital, le revoilà qui court de plus belle. Je veux bien que l’on fasse quelques entorses avec le réalisme dans un thriller d’action, mais Voice 2 fait fi de la tolérance du spectateur pour les lois de l’univers diégétique.

L’inspecteur Do Kang Woo à l’article de la mort

Sur les douze épisodes que compte Voice 2, seules deux affaires se révèlent sympathiques à suivre. La première est celle de l’enfant kidnappé (épisodes 3 et 4), qui ménage un bon suspense et nous vaut un joli plan-séquence lorsque Do Kang Woo traque le coupable dans sa retraite. La seconde, la plus distrayante, est celle du youtubeur mégalomane qui fait des vidéos d’horreur en temps réel avec son associé (épisodes 6 et 7).

Ces épisodes ne suffisent pas à rattraper l’histoire de fond vaseuse, mais ils donnent un aperçu de ce qu’aurait pu être Voice 2 si la scénariste avait convenablement développé son sujet.

Le plus terrible dans tout cela, c’est que le succès de Voice 2 a déjà entraîné la mise en route d’une saison 3. Nous allons donc peut-être enfin comprendre ce qui se passe dans le dernier épisode. Pour le reste, mieux vaut passer son chemin.

Caroline Leroy

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