Hopeless : un premier film noir étonnamment touchant

par Elodie Leroy

Entre film de gangsters et chronique sociale, Hopeless marque les débuts prometteurs du réalisateur Kim Chang Hoon, qui peut compter sur un casting investi mené par le charismatique Song Joong Ki. Un film à découvrir dans les salles françaises depuis le 17 avril 2024.

Violenté quotidiennement par son père, harcelé par des camarades de lycée, Yeon Gyu (Hong Sa Bin) rêve de partir très loin, en Hollande, un pays où tout paraît possible. En attendant, il est sommé de dédommager un camarade de classe qu’il a frappé pour protéger sa demi-sœur Ha Yan (Kim Hyung Seo). Viré par le patron du restaurant où il travaille, il se retrouve sans revenu, jusqu’à ce qu’un petit chef de gang du nom de Chi Geon (Song Joong Ki) paie sa dette à sa place. C’est le début d’une nouvelle vie pour Yeon Gyu, qui intègre un business de trafic de motos supervisé par Chi Geon, lui-même soumis à un baron de la mafia locale.

© Bac Films

Dans les salles depuis le 17 avril, Hopeless est le tout premier long métrage de Kim Chang Hoon et a largement attiré l’attention. Non content d’avoir reçu les honneurs d’une projection au Festival de Cannes 2023 dans la section Un Certain Regard et dans de nombreux festivals (récemment au Festival du Film policier de Reims), le film a également décroché quatre nominations aux Baeksang Arts Awards, dont une pour le réalisateur et une pour chacun des trois acteurs principaux – Hong Sa Bin, Song Joong Ki et Kim Hyung Seo.

Il faut dire que Kim Chang Hoon ne nous ménage pas. Outre les explosions de violence qui ponctuent le film, dont les manifestations les plus dérangeantes sont filmées en très gros plan (doigts coupés, ongles arrachés…), la peinture sociale qui se dessine autour de Yeon Gyu s’avère particulièrement glauque. Dans le taudis où vit l’adolescent avec sa famille, un lieu sombre et crasseux que Kim Chang Hoon filme de manière organique, se joue un drame quotidien. Son beau-père bat constamment Yeon Gyu sous l’œil indifférent de sa mère et au désespoir de sa demi-sœur.

© Bac Films

Servi par une narration maîtrisée, malgré quelques longueurs, Hopeless repose sur un canevas classique, celui du protagoniste socialement vulnérable qui fait son entrée comme junior dans le monde cruel de la mafia locale, à ses risques et périls. L’histoire aurait pu être convenue si Kim Chang Hoon n’avait pas centré le récit sur la relation qui noue entre Yeon Gyu et Chi Geon, ce « grand frère » qui se reconnait en lui et décide de le prendre sous son aile. Cette amitié apporte un peu de lumière dans un monde de brutes ultra hiérarchisé, où tuer fait partie des rites initiatiques à accomplir pour se faire accepter.

Révélation du film, Hong Sa Bin (A Bloody Lucky Day) délivre une prestation habitée dans le rôle de Yeon Gyu et exprime à merveille, rien que par son regard, le désenchantement d’une jeunesse laissée sur le carreau, mais qui rêve encore d’une nouvelle vie. Face à lui, Song Joong Ki (Je m’appelle Loh Kiwan), qui a accepté de ne pas percevoir de cachet pour le film, joue de son regard perçant pour conférer à Chi Geon un charisme intimidant dans sa posture de chef à la force tranquille, tout en lui apportant juste ce qu’il faut de chaleur dans sa relation avec Yeon Gyu.

© Bac Films

L’autre lueur d’espoir du film est apportée par Ha Yan, la demi-sœur qui a encore envie d’y croire. Kim Hyung Seo (The Worst of Evil), alias BIBI, est un choix judicieux pour camper ce personnage dont le tempérament bien trempé cache un idéalisme naïf mais touchant. Pour ses débuts d’actrice, la chanteuse fait un coup d’éclat et s’impose déjà comme un talent à suivre.

La différence d’orientation entre le titre original du film et son titre international s’avère intéressante. L’un, Hollande (화란), évoque la terre promise sur laquelle Yeon Gyu rêve de se rendre pour trouver une société plus égalitaire, l’autre, Hopeless, décrit le monde impitoyable dont il tente désespérément de s’extirper. Les deux se complètement finalement très bien pour traduire le mélange de noirceur absolue et d’espoir qui se dégage de ce film pas si nihiliste qu’il n’y paraît.

Elodie Leroy

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