Photo Alienoid (2022)

Critique : Alienoïd, un cocktail rafraîchissant de SF et d’arts martiaux

Avec son univers un peu fou, Alienoïd réussit le pari osé de mêler les genres éloignés de la science fiction et de la fantasy d’arts martiaux pour offrir deux heures de pur divertissement. On ne boude pas son plaisir.

Un mage maladroit qui fait des arts martiaux, une fille armée d’un flingue sous l’ère Goryeo, des robots transformistes qui voyagent dans le temps… Mélangeant les styles et les époques, le film Alienoïd réunira autant qu’il surprendra les amateurs d’histoires de robots, de films de sabre et de mythologies. Avec un budget confortable de 23 millions d’euros, le réalisateur Choi Dong Hoon nous entraîne dans une quête épique autour d’une épée sacrée à la faveur d’un scénario bien ficelé emmené par des personnages attachants. Ces derniers sont campés par des acteurs charismatiques, parmi lesquels Ryu Jun Yeol, Kim Tae Ri et Kim Woo Bin. Nous avons vu Alienoïd à l’Etrange Festival à Paris et nous avons été conquises.

Robots, aliens et arts martiaux

Depuis des siècles, les aliens emprisonnent leurs criminels dans le corps des humains sans que ces derniers ne se doutent de rien. Sous l’ère Goryeo, en 1391, un jeune chasseur de primes du nom de Mureuk (Ryu Jun Yeol) accepte une mission consistant à retrouver l’Epée divine. Il rencontre Yi An (Kim Tae Ri), une mystérieuse jeune femme qui semble rechercher le même objet. En 2022, Guard (Kim Woo Bin) et le robot Thunder sont chargés de surveiller les extraterrestres prisonniers. C’est alors qu’une attaque alien provoque l’ouverture d’une porte temporelle reliant les deux époques.

Ryu Jun Yeol (Alienoid)

La construction de l’intrigue d’Alienoid a été d’une telle complexité que Choi Dong Hoon (Tazza, The Thieves) a consacré deux ans et demi à l’écriture du scénario. En ajoutant une année complète de préproduction et 13 mois de tournage, le film a mis près de cinq ans à voir le jour. Le résultat à l’écran est gratifiant : en confrontant deux univers opposés, ceux du film historique et de la science-fiction, Alienoid en met plein la vue avec des scènes d’action énergiques, qu’il s’agisse des combats voltigeant en costumes ou des affrontements impitoyables entre robots.

La maîtrise de la narration de Choi Dong Hoon n’est plus à démontrer : le réalisateur révélait déjà, rien que dans le film d’action The Thieves, une capacité à gérer une intrigue faisant intervenir une multitude de personnages. Le défi d’Alienoïd consiste à créer une histoire unique à partir d’événements se déroulant simultanément à plusieurs époques. Le film aurait pu ressembler à une cacophonie de sous-intrigues n’ayant ni queue ni tête, mais il n’en est rien. Le va et vient entre les époques n’entame jamais la clarté de l’ensemble. Le métrage aurait gagné à être légèrement condensé – il dure tout de même 2h22 – mais le cocktail d’humour et d’action fonctionne à plein et l’imagination est au rendez-vous jusqu’à la dernière minute.

Kim Tae Ri (Alienoid)

S’agissant de l’action pure, Alienoïd se montre efficace et généreux quel que soit le style adopté. Les scènes d’action se déroulant sous l’ère Goryeo sont sans conteste les plus réussies sur le plan esthétique : les acteurs croisent le fer avec élégance, utilisent la magie et s’envolent sur les toits comme dans les wu xia pian (films d’arts martiaux chinois). Cela dit, les affrontements de robots aux designs futuristes ne déparent pas et s’avèrent même très fun à regarder grâce à des effets digitaux d’une grande fluidité et un beau travail sur les lumières.

La classe Kim Tae Ri, le style Kim Woo Bin

L’histoire a également le bon goût de se concentrer sur ses personnages principaux, sans pécher par excès de prétention s’agissant des enjeux globaux. Bien entendu, le monde est menacé par une entité maléfique qui cherche à détruire toute vie sur Terre, mais les superhéros d’Alienoid n’ont rien à voir avec les justiciers aseptisés des films Marvel ni avec les héros masqués dépressifs de DC Comics. Ces superhéros-là ont tous leur petit caractère, leurs imperfections qui en font des protagonistes attachants et souvent drôles.

Kim Woo Bin (Alienoid)

On retiendra tout particulièrement la téméraire Yi An, campée par une Kim Tae Ri (Twenty Five Twenty One) pleine de classe dans l’action – la voir brandir avec coolitude une arme à feu dans un monde médiéval fait son petit effet – mais aussi l’impayable Mureuk, interprété avec une bonne dose d’autodérision par Ryu Jun Yeol (Lost). Le rencontre des deux personnages sur fond de faux mariage traditionnel est hilarante.

On adore également Guard et Thunder, tous deux joués dans leur forme humaine par Kim Woo Bin (Our Blues), qui s’en donne à cœur joie pour accentuer le contraste entre la personnalité coincée de Guard et la décontraction stylée de Thunder (le costume rose et le regard de crooner, on adore !). Enfin, on a plaisir à retrouver So Ji Sub (Doctor Lawyer) en alien menaçant et Yum Jung Ah (Cleaning Up) et Jo Woo Jin (Narco-Saints) en mages taoïstes un peu cinglés.

Alienoid était projeté en France à l’Etrange Festival, qui s’est déroulé à Paris en septembre dernier, et sera de nouveau projeté au Festival du Film Coréen à Paris les 29 et 31 octobre 2022. La seconde partie d’Alienoid s’intéressera à la quête des mages taoïstes autour de l’Epée divine et devrait voir le jour en 2023.

Elodie Leroy

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