Won Bin est l’ange noir de ce thriller d’action ultraviolent et émouvant réalisé par Lee Jeong-Beom. Un must du cinéma coréen.
Gros succès en Corée du Sud, The Man From Nowhere s’inscrit dans la veine des polars réalistes sud-coréens de ces dernières années, marqués par un ton résolument noir et entretenant un certain jusqu’auboutisme dans son propos comme dans ses poussées de violence. Reposant sur un scénario solide et une interprétation convaincante (Won Bin, décidément très bon), The Man from Nowhere ne révolutionne pas le genre, mais s’impose comme un thriller maîtrisé, divertissant et finalement touchant.
Un ange noir en quête d’affection
Sorti en Corée du Sud en août dernier, The Man From Nowhere a réuni plus de 6,2 millions de spectateurs sur la péninsule, écrasant contre toute attente et de très loin le score du dernier film de Kim Jee-Woon, I Saw The Devil (1,8 million d’entrées). Présenté en ouverture au récent Festival Franco-Coréen du Film, le film a fait salle comble à chacune de ses projections (une petite pensée pour les spectateurs qui ont fait la queue à l’Action Christine sans pouvoir rentrer). Le film a également remporté le Grand Prix au Festival du film policier de Beaune.
Réalisé par Lee Jeong-Beom (Cruel Winter Blues), The Man From Nowhere débute par la rencontre de deux personnages que tout semble opposer. Soomi (Kim Sae-Rong, adorable) est une petite fille d’une dizaine d’années rebelle et livrée à elle-même, dont la mère partage son temps entre le trafic de drogue et ses rendez-vous avec son amant. En mal d’affection, Soomi recherche la compagnie de son voisin de pallier, Cha Tae-Sik (Won Bin), un trentenaire taciturne au passé trouble, qui vit reclus dans son appartement miteux et gagne sa vie en tant que prêteur sur gages.
Lorsque Soomi et sa mère sont kidnappées par des trafiquants, Tae-Sik se retrouve impliqué malgré lui dans l’affaire. Obligé de faire la mule pour sauver ses deux voisines, il n’a d’autre choix que de sortir de sa tanière pour s’exécuter. Arrêté par la police, il réalise que le sort de Soomi est sans espoir et décide de s’évader.
Traqué par les forces de l’ordre, Tae-Sik découvre un trafic sordide dont les enfants démunis sont les malheureuses victimes.
La première bonne raison de regarder The Man From Nowhere tient en deux syllabes : Won Bin. L’acteur de Frères de Sang (Kang Je Gyu) et de Mother (Bong Joon Ho) déborde de charisme dans le rôle de Tae-Sik, sorte d’ange noir au charisme silencieux. La discrétion de Tae-Sik, qui peine à communiquer avec les autres, n’a d’égal que la violence du réglement de compte dans lequel il s’embarquera. A cette ambivalence, Won Bin apporte une touche personnelle par la profondeur de son regard.
Au début du film, Tae-Sik arbore une chevelure qui masque en partie son visage, un style très BD qui suggère aussi sa réticence à affronter la cruauté du monde extérieur. Véritable rayon de soleil dans son existence, la petite Soomi incarne la rédemption de cet anti-héros rattrapé par son passé – la rencontre n’est pas sans évoquer Léon de Luc Besson.
Justice personnelle
Enchaînant les scènes d’action et les courses-poursuites à un rythme haletant, The Man From Nowhere repose sur un scénario bien ficelé qui croise plusieurs jeux du chat et de la souris. Le film s’intéresse avant tout au destin peu enviable des opprimés, ces êtres jetables, presque cannibalisés par la société, et dont la disparition ne figure dans aucune rubrique de faits divers.
Comme souvent dans les thrillers réalistes coréens, la police semble inapte à débrouiller l’affaire par ses propres moyens, et si l’on n’atteint pas les prouesses d’incompétence des flics de Memories of Murder et de The Chaser, tout semble justifier l’absence totale de confiance des personnages dans les forces de l’ordre.
Évoluant en roue libre et révélant des talents frisant ceux d’un superhéros, Tae-Sik reste insaisissable et fait un justicier décidément impitoyable, recourant aux procédés les plus cruels pour venir à bout de la racaille – il va jusqu’à brûler vif un homme attaché sur une chaise.
Les scènes d’action valent le détour, qu’il s’agisse des fusillades énergiques ou des affrontements à l’arme blanche. On ne compte plus les bras coupés, les yeux crevés, les gorges tranchées – en bref, les cadavres s’amoncèlent tout au long du film avec un jusqu’au-boutisme très coréen.
On pourra reprocher à The Man From Nowhere d’aller un peu loin dans la valorisation de la justice personnelle, mais le dénouement rassure sur la morale du film et l’histoire s’avère finalement touchante. Evident l’écueil du happy end à l’américaine, mais aussi celui du final de makjang à la coréenne, le film s’achève sur une note émotionnelle salvatrice après tout ce massacre.
The Man From Nowhere inspire une série TV
Update 18/01/2020 : The Man From Nowhere est la principale source d’inspiration de la série coréenne Duel avec Jung Jae Young et Yang Se Jong, que nous vous conseillons vivement. La rencontre entre Lee Sung Hoon et la petite Soo Yeon évoque celle de Tae Sik et Soomi.
Enfin, rappelons que la chanson Dear, que l’on entend dans The Man From Nowhere, est interprété par le groupe indie Mad Soul Child. C’est en référence à Dear que la production de Duel a fait appel à Jin Sil, du groupe Mad Soul Child, pour chanter l’émouvante chanson Nightmare.
e drama fait d’ailleurs appel au talent de Jin Sil, membre du groupe Mad Soul Child, pour le morceau principal de l’OST.
Elodie Leroy
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