Critique : Goodbye Mr Black, un revenge drama sans envergure

par Caroline Leroy

Cocktail d’action et de romance, le drama de Lee Jin Wook et Moon Chae Won propose un pitch engageant, mais souffre d’un développement et d’une exécution médiocres. 

Goodbye Mr Black s’affiche comme le revenge drama à ne pas manquer cette année. Son beau casting a de quoi convaincre : Lee Jin Wook et Moon Chae Won occupent les rôles principaux, secondés par Kim Kang Woo et Yoo In Young. Le drama est adapté d’un webtoon à succès, lui-même ouvertement inspiré du Comte de Monte Cristo d’Alexandre Dumas. Avec les meilleures intentions du monde, force est cependant de constater que Goodbye Mr Black est loin d’être aussi excitant que à l’écran, et qu’il déçoit sur à peu près tous les tableaux, acteurs y compris.

La trame de Goodbye Mr Black s’articule autour de la quête de justice de Cha Ji Won (Lee Jin Wook), injustement accusé du meurtre suite à la trahison de son meilleur ami Min Sun Jae (Kim Kang Woo). Cha Ji Won est un NAVY SEAL et un officier de l’UDT (Underwater Demolition Team). Son père Cha Jae Wan (Jung Dong Hwan), à la tête du groupe Sunwoo, traite Min Sun Jae comme son fils depuis son jeune âge et celui-ci vit dans la demeure familiale aux côtés de Ji Won, de sa petite amie Yoon Mari (Yoo In Young) et de sa sœur Ji Soo (Im Se Mi). Mais Sun Jae, très amer en dépit des apparences, se laisse entraîner par le sinistre Baek Eun Do (Jeon Kuk Hwan) dans un complot visant Cha Jae Wan. Sun Jae va jusqu’à faire accuser Ji Won du meurtre de ce dernier, faisant de lui un fugitif alors qu’il se trouve en Thaïlande.

Par chance, Ji Won fait la connaissance sur place d’une jeune voleuse (Moon Chae Won) qui l’aide à se cacher. Orpheline, celle-ci ne possède pas de nom : il lui offrira le surnom de « Swan ». Cinq ans plus tard, Sun Jae a épousé Mari et dirige Sunwoo Group. Cha Ji Won revient à Séoul pour accomplir sa vengeance sous le nom de « Black ».

Le revenge drama est un genre particulièrement prisé en Corée du Sud et pour les amateurs du genre, c’est avec une impatience non dissimulée que l’on attend le cru de la nouvelle année. Je ne cache pas que j’ai un faible pour ces histoires rocambolesques où s’entremêlent sans modération les éléments de mélodrame, d’action, de romance, parfois même d’espionnage ou bien d’intrigues politiques. Du makjang, en somme.

Or le scénario de Goodbye Mr. Black est co-signé par Hwang Mi Na, l’auteure du webtoon original, mais aussi par Moon Hee Jung, que l’on pourrait qualifier de spécialiste du makjang. On lui doit en effet le drama culte Stairway to Heaven et le très larmoyant I Miss You. Nos attentes étaient par conséquent légitimes.

Soyons honnête : Goodbye Mr Black se laisse suivre facilement durant ses premiers épisodes. Le rythme soutenu de l’intrigue, les acteurs glamour, les courses-poursuites dans les rues thaïlandaises, le motif du beau héros en danger secouru par une jolie jeune femme, le tout fonctionne plutôt bien.

On entrevoit malgré tout quelques défauts gênants. Le premier, c’est une installation précipitée de l’intrigue. Les événements s’enchaînent à une telle vitesse dans les deux premiers épisodes que la caractérisation des personnages s’avère trop simpliste. On a notamment du mal à comprendre exactement ce qui motive le changement d’attitude radical de Min Sun Jae vis-à-vis de Cha Ji Won, alors que celui-ci ne lui a concrètement rien fait. La jalousie maladive est un argument valable mais elle aurait gagné à être suggérée avec davantage d’insistance, sur une durée plus longue en amont.

Dans l’ensemble, Goodbye Mr Black s’appuie sur un scénario sans imagination, qui se contente de multiplier les rebondissements, parfois jusqu’à l’absurde (les derniers épisodes, en particulier), comme si cela suffisait à créer ou à maintenir un suspense. Cette histoire de vengeance ne possède aucune ampleur, aucun souffle.

Dans le même genre, un drama comme Shark faisait bien mieux en dépit d’une mise en place laborieuse, et avait le mérite d’avoir un propos de fond. Sans aller jusque là, Goodbye Mr Black déçoit même en tant que simple thriller fun, maladroitement fagoté à l’aide de ficelles convenues, voire grossières.

Je pense à ce moment où Ji Won/Black décide soudain de plaider coupable du meurtre dont il cherchait jusqu’à présent à se défendre, parce que son ennemi menace de s’en prendre à Swan (épisode 11). Dans la foulée, il plaque celle-ci sans ménagement, mais qu’importe si elle souffre car c’est pour son bien. Un ressort classique du drama coréen utilisé de manière incongrue dans ce contexte.

Goodbye Mr Black met trop souvent notre indulgence à l’épreuve, le scénario ne brillant pas par sa crédibilité. Swan ne sait ni lire ni écrire le coréen lorsque Ji Won la baptise dans le quatrième épisode. Cinq ans après, on la retrouve en journaliste pugnace, alors qu’elle n’a toujours pas retrouvé la mémoire.

On apprend d’autre part que Cha Ji Won, suite à l’accident qui l’a laissé pour mort en Thaïlande, est atteint d’un anévrisme. Il souffre de violents maux de tête tandis que sa main droite s’ankylose à l’improviste. Que croyez-vous, cela ne l’empêche pas de se jeter la tête la première dans la moindre bagarre ou de conduire sa voiture à tout bout de champ, malgré les risques que cela comporte pour lui et pour les autres.

Enfin, Ji Soo, la sœur de Ji Won, est devenue aveugle suite à sa chute de l’étage d’un immeuble. Or quand on la retrouve après cinq ans de captivité, elle est parfaitement coiffée et ses ongles sont soigneusement manucurés. On pourrait continuer longtemps comme cela.

La cinématographie est belle mais le réalisateur Han Hee (Dr Jin, Empress Ki) se contente de livrer une mise en scène générique. Les scènes d’action sont correctement filmées, sans toutefois laisser un souvenir impérissable. La même chose peut être dite des scènes de jeu. Quant aux acteurs, la plupart ne sont tout simplement pas à leur place.

J’aime beaucoup Lee Jin Wook, et ce depuis la première fois où je l’ai vu jouer – c’était dans Powerful Opponents, face à Chae Rim, et j’avais vu dès le premier épisode qu’il sortait du lot. Il est brillant dans ce petit bijou qu’est Nine: 9 Times Time Travel. Néanmoins, dans la peau de Black le héros vengeur, il n’est pas l’homme de la situation. Le rôle est mal écrit, c’est un fait. Mais Lee Jin Wook manque d’agressivité, de mystère, de noirceur dans les moments de tension. Cela étant dit, il est vraiment bon dans les scènes dramatiques de Goodbye Mr Black et il assure dans l’action.

Le cas de Moon Chae Won est pire, tant elle est sous-employée. Alors qu’elle est une actrice de premier plan (Good Doctor, The Innocent Man), elle reste ici cantonnée à un rôle de faire-valoir, tout juste bonne à se préoccuper du héros. Malgré un passé pour le moins problématique, elle n’a jamais droit à être dans la lumière. Sa relation avec Cha Ji Won est paternaliste et les deux acteurs peinent de ce fait à rendre crédible leur couple. C’est d’autant plus désolant que Moon Chae Won est une bonne actrice qui a d’ordinaire une excellente alchimie avec ses partenaires (Song Joong Ki, Lee Seung Gi, Joo Won). Dommage, elle est si mignonne avec ses cheveux courts.

Yoo In Young, quant à elle, est fade en gentille fille, et il faut attendre un long moment avant que Mari donne l’impression d’avoir un semblant de personnalité. On la préfère nettement dans Mask ou dans Oh My Venus, mais attention à ne pas se laisser enfermer éternellement dans le personnage de la bourgeoise tourmentée. Elle est évidemment toujours mieux que Im Se Mi, « actrice » au jeu sommaire qui gâche toutes les scènes dans lesquelles elle apparaît, avec son air bête.

Parmi les acteurs principaux, Kim Kang Woo (Missing Noir M) est sans doute celui qui tire le mieux son épingle du jeu : il est celui qui fait le plus avec ce qu’il a. Min Sun Jae manque de dimension, c’est un homme mauvais et petit, ambigu avec sa femme, impitoyable avec ses ennemis, et il parvient à se montrer inquiétant tout en attirant notre sympathie malgré les innombrables exactions de son personnage.

Cela me rappelle Golden Cross, un autre revenge drama dans lequel Kim Kang Woo tient cette fois le rôle du héros bafoué. Je l’avais trouvé vraiment intéressant à partir du dernier quart du drama, lorsqu’il entreprenait de se venger : il m’avait notamment impressionnée dans une scène vers le milieu de l’épisode 16, où son personnage laissait subtilement transparaître toute sa détresse à travers son seul regard, tout en jouant la comédie de l’indifférence face à ses ennemis hilares.

Les autres bonnes surprises sont à chercher dans les seconds rôles : bien que trop peu présents, Song Jae Rim (Unkind Ladies) et Lee Won Jong (Hidden Identity) nous mettent un peu de baume au cœur le temps de quelques scènes.

Durant sa diffusion sur MBC, entre le 16 mars et le 19 mai 2016, Goodbye Mr Black n’a jamais atteint les 10% de part d’audience, même passé le dernier épisode du bulldozer Descendants of the Sun, son concurrent sur KBS2. On comprend aisément pourquoi. C’est un drama à ne voir que si, comme moi, on aime les acteurs principaux et qu’on a envie de se laisser embarquer dans leurs nouvelles aventures, plus proches de la balade en bateau mouche que d’un tour dans les montagnes russes.

Caroline Leroy

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Kim Kang Woo dans Goodbye Mr. Black

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