Jung_E, de Yeon Sang Ho (Netflix)

Critique : Jung_E (Netflix), un thriller SF humaniste aux scènes d’action spectaculaires

Avec Jung_E, Yeon Sang Ho transforme l’actrice Kim Hyun Joo en guerrière du futur et fait virevolter les robots dans des scènes de combat dantesques, tout en insufflant beaucoup d’humanité à son histoire.

La robotique et le développement de l’intelligence artificielle sont des sujets passionnants qui risquent de prendre de plus en plus d’importance dans notre quotidien, pour le meilleur et pour le pire. Réalisé par Yeon Sang Ho et prévu sur Netflix le 20 janvier 2023, Jung_E imagine un monde angoissant où les IA sont utilisées à des fins militaires et où le cerveau humain peut être cloné à l’infini. Servi par des effets spéciaux luxueux, ce thriller de science-fiction aborde des questions éthiques pertinentes sur les technologies de demain à travers une histoire étonnamment émotionnelle, tout en offrant de belles montées d’adrénaline avec des scènes d’action haletantes et visuellement maîtrisées. Le film d’action SF à ne pas manquer en ce début d’année.

Kim Hyun Joo / Credits : Netflix

IA de combat

Au 22ème siècle, la Terre a été ravagée par les changements climatiques, obligeant l’humanité à migrer vers des abris construits dans l’espace. Alors que la guerre civile fait rage, une société de développement d’IA tente de créer le soldat ultime en clonant le cerveau de Yun Jung Yi (Kim Hyun Joo), une mercenaire de légende plongée dans le coma à la suite d’une mission. Yun Seo Hyun (Kang Soo Yeon), la scientifique qui dirige le projet JUNG_E, n’est autre que la fille du cobaye.

Après les zombies de Dernier Train Pour Busan et les monstres de Hellbound, Yeon Sang Ho s’attaque à la science-fiction et qui plus est au film de robots. Les références du genre sont principalement américaines et connues de tous, de la franchise Terminator à celle de Transformers, en passant par I Robot. Autant dire que le film Jung_E se mesure à des monuments.

Ryu Kyung Soo / Credits : Netflix

Premier constat, les moyens techniques et le soin artistique sont au rendez-vous. Entre les décors à couper le souffle de la mégalopole cernée par les eaux, et les intérieurs envahis par les technologies robotiques, Jung_E déploie sous nos yeux un univers visuel très riche, qui ne pourra laisser insensibles les amateurs de SF pure. La scène d’ouverture, immersive, nous plonge dans le feu de l’action à travers un affrontement sans merci entre Jung-E et une horde de machines toujours plus rapides et redoutables. Soutenue par une animation 3D réussie, l’intégration des robots dans les prises de vues réelles est aussi servie par travail somptueux sur les lumières.

Jung_E plante son décor dans un univers dystopique où l’humanité semble avoir trouvé le secret de l’immortalité à travers le clonage et la fusion avec les IA, et où il ne reste plus guère de place pour les relations et les sentiments humains. Le concept de la fusion homme/machine qui sert de point de départ à l’histoire n’est pas sans évoquer Ghost in the Shell, mais le film de Yeon Sang Ho s’éloigne sensiblement du classique de Mamoru Oshii en centrant son récit sur sa dimension humaine.

Kang Soo Yeon / Credits : Netflix

Comme souvent dans les thrillers coréens, il est finalement question de famille. La relation mère/fille entre la mercenaire et la scientifique nous est contée à la faveur de quelques flashbacks signifiants et de beaux moments intimistes, qui apportent du relief à l’histoire et aux deux personnages féminins. Sans atteindre la profondeur du drama Duel, qui reliait la question du clonage à la notion de lien familial, Jung_E aborde de manière étonnamment émotionnelle les enjeux éthiques liés à l’utilisation des technologies du futur et ses conséquences sur le principe même de droits humains.

Kim Hyun Joo en combattante du futur

Si l’émotion est au rendez-vous, le réalisateur Yeon Sang Ho n’oublie pas pour autant que le spectateur a signé pour voir du grand spectacle impliquant les robots. Sur ce plan, malgré un premier tiers un peu lent, Jung_E tient ses promesses. Le film offre plusieurs scènes d’action intenses, notamment un climax étourdissant impliquant des combats de robots filmés avec virtuosité et une virée vertigineuse dans un train aérien en marche. Après Dernier Train Pour Busan et Peninsula, Yeon Sang Ho montre une nouvelle fois son goût pour les luttes frénétiques dans des véhicules à grande vitesse, un défi qu’il relève chaque fois avec brio grâce à sa maîtrise de l’espace et du mouvement et une belle gestion des effets sonores.  

Kim Hyun Joo (Tramway) révélait déjà des qualités d’actrice d’action dans Hellbound et impressionne encore plus dans des scènes de combat badass de Jung_E. Transformée en combattante du futur, elle dégage une aura de guerrière froide dans l’action, mais montre aussi le visage d’une mère chaleureuse dans les scènes émotionnelles. A ce propos, le design du robot-squelette reprenant ses traits et son regard mélancolique est une jolie réussite.

La scientifique est interprétée par Kang Soo Yeon (Jury), qui a malheureusement quitté ce monde en mai 2022 des suites d’une hémorragie cérébrale. L’actrice parvient, grâce à la justesse de son jeu, à exprimer le cheminement intérieur de son personnage, qui se reconnecte petit à petit à ses sentiments pour sa mère au contact de ces robots.

Yeon Sang Ho retrouve par ailleurs plusieurs de ses acteurs fétiches dans Jung_E. Outre Kim Hyun Joo, le casting met en avant l’acteur Ryu Kyung Soo (Glitch) dans le rôle d’un scientifique tour à tour amusant et effrayant. Kim Hyun Joo et Ryu Kyung Soo apparaissaient tous deux l’année dernière dans Hellbound et seront de nouveau dans le drama Family Gravesites, une autre série Netflix écrite par Yeon Sang Ho et qui devrait arriver dans le courant de l’année. L’actrice Uhm Ji Won (The Cursed) fait une apparition spéciale remarquée dans le film.

Jung_E sera disponible sur Netflix à partir du 20 janvier 2023. Nous vous conseillons de regarder le film sur un écran suffisamment grand pour profiter pleinement du travail sur les décors et les effets spéciaux.

Elodie Leroy

Lire aussi | Critique : Alienoïd, un cocktail rafraîchissant de SF et d’arts martiaux

Vous aimerez aussi