Le film Vanishing de Denis Dercourt

Critique : Vanishing, un thriller captivant et humain

Réunissant Olga Kurylenko et Yoo Yeon Seok sur une enquête au rythme serré, le thriller franco-coréen Vanishing distille un charme entêtant en dépit de la noirceur de son sujet.

De passage à Séoul dans le cadre d’un colloque scientifique, la professeure de médecine légale Alice Launey (Olga Kurylenko) est sollicitée par l’inspecteur de police Park Jin Ho (Yoo Yeon Seok) pour l’aider à identifier le cadavre d’une femme retrouvé dans un fleuve. Elle a en effet mis au point une méthode révolutionnaire de prise d’empreintes digitales, qui sera mise à contribution dans le cadre d’une affaire de disparition aux ramifications complexes. Aidée de l’interprète Lee Mi Sook (Ye Ji Won), qui continue de lui prodiguer son assistance en dehors de la conférence, elle commence bientôt à s’investir dans cette affaire qui réveille en elle de vieux démons disparus.

Dès l’annonce de son tournage au début 2020, Vanishing suscitait une attente particulière pour l’association de talents inattendue entre le réalisateur français Denis Dercourt (La Tourneuse de Pages), l’actrice française Olga Kurylenko (Quantum Of Solace) et l’acteur coréen Yoo Yeon Seok (Hospital Playlist).

Il s’agit d’une adaptation libre du roman policier Les Disparues de Shanghai de Peter May, publié en 2001 sous le titre original The Killing Room. Mais alors que l’intrigue se déroule à l’origine en Chine, Denis Dercourt choisit de la transposer en Corée du Sud afin d’éviter les complications de la censure.

Bien lui en a pris : le pays du Matin Calme semble l’avoir inspiré, tant dans l’aspect purement thriller du film, que dans sa dimension humaine, très réussie.

Les premières séquences de Vanishing dépeignent de manière méticuleuse les agissements d’un réseau de trafiquants d’organes particulièrement bien rôdé. Si les visages et les méthodes des coupables nous sont volontairement révélés au fur et à mesure de l’enquête policière, le film ne perd cependant jamais en effet de suspense. Il parvient également à créer une attente sur la manière dont les policiers coréens, aidés de cette scientifique française, vont comprendre ce qui se trame et remonter la filière du crime.

Le dynamisme des cadrages et le montage rythmé participent à créer une impression de fluidité qui rend très aisée l’immersion dans l’intrigue. Ce sentiment est encore renforcé par la manière dont le réalisateur parvient à nous rendre les lieux et les personnages rapidement familiers.

A ce titre, la manière dont il restitue l’ambiance urbaine de Séoul surprend agréablement par l’absence totale des clichés auxquels nous ont longtemps habitués les films occidentaux se déroulant en Asie. Qu’il s’agisse des drames psychologiques à la Lost In Translation (Sofia Coppola) ou des polars à la Black Rain (Ridley Scott), les protagonistes y apparaissent en général soit perdus dans un univers aux mœurs incompréhensibles, soit franchement hostiles à la culture locale. Dans la plupart des cas, il subsiste en tout état de cause une distance et des préjugés irréductibles.

Vanishing adopte une démarche inverse, à l’image de son personnage principal Alice Launey, notre guide dans cette aventure, dont l’esprit à la fois pragmatique et ouvert rend possible la rencontre avec le pays et ses habitants. Stoïque et professionnelle lorsqu’elle réalise ses autopsies, Alice laisse en réalité derrière elle un passé douloureux. Elle semble ainsi se ressourcer lorsqu’elle parcourt les rues de la ville à pied, le regard curieux, ou qu’elle déguste seule des tteokbokki sur un étal la nuit. L’interprétation sobre et juste d’Olga Kurylenko donne la nuance de cette femme plus originale et sensible qu’il n’y paraît au premier abord.

Face à elle, Yoo Yeon Seok compose un personnage de flic à la fois consciencieux et attachant, prouvant une fois encore sa versatilité après ses rôles charismatiques dans Mr. Sunshine ou encore Dr. Romantic. Magicien à ses heures, et plutôt à l’aise avec l’anglais – voire le français –, le personnage de Jin Ho est un homme peu conventionnel qui semble posséder un don pour les relations humaines. Le naturel avec lequel l’acteur aborde ses scènes avec les enfants nous rappelle au passage qu’il faisait dernièrement un excellent pédiatre dans la série Hospital Playlist.

Denis Dercourt parvient même à insuffler une élégante touche de romantisme dans la relation d’Alice et Jin Ho, sans que cela ne semble forcé. L’alchimie évidente entre Olga Kurylenko et Yoo Yeon Seok est ainsi pour beaucoup dans le charme entêtant de Vanishing.

D’une manière générale, et même si l’enquête policière tient une place prédominante dans l’intrigue, les personnages semblent vivants, avec une personnalité bien définie et des enjeux personnels qui se dévoilent au fur et à mesure, ce qui distingue le film du tout venant du thriller. Cette qualité se vérifie également avec le personnage de Mi Sook, interprété par l’excellente actrice Ye Ji Won (Still 17), qui fait l’effort de dire la plupart de ses répliques en français.

De même, les autres acteurs secondaires, tous très confirmés dans l’industrie cinématographique et télévisée coréenne, se révèlent parfaits dans leurs rôles respectifs, comme Choi Moo Sung (The Nokdu Flower), Lee Seung Joon (Record of Youth) ou encore Sung Ji Ru (Demon Catchers). Quant à la petite Park So Yi (Deliver Us From Evil), qui joue la nièce de Park Jin Ho, elle illumine l’écran à chacune de ses apparitions.

Finalement, le seul reproche que l’on peut faire au film est de ne pas être assez long, tant on aurait aimé en savoir davantage sur la plupart de ces personnages.

Vanishing a été projeté au Publicis Cinéma le 13 mars 2022 dans le cadre des « Dimanches en Corée » en présence du réalisateur Denis Dercourt. Il sera disponible en France sur Canal+ à partir du 5 avril, tandis qu’il bénéficiera d’une sortie nationale dans pas moins de 700 salles en Corée du Sud le 30 mars.

Caroline Leroy

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