Envoûtante, sexy et superbement interprétée, la série romantique Doona! est une merveille de délicatesse et de nostalgie qui nous submerge d’émotion et laisse une profonde impression. Découvrez notre critique.
Le réalisateur Lee Jung Hyo possède décidément un don pour créer des couples instantanément iconiques. Après Son Ye Jin et Hyun Bin dans Crash Landing on You, il réitère le miracle en réunissant à l’écran l’actrice Bae Suzy (Vagabond) et l’acteur Yang Se Jong (My Country: The New Age), dont l’extraordinaire alchimie transcende chaque épisode de Doona!, son nouveau hit.
Ecrit par Jang Yu Ha, la série coréenne Doona ! est l’adaptation live du webtoon populaire The Girl Downstairs de Min Song Ah, dont les 154 chapitres ont été publiés entre juillet 2019 et juillet 2022 sur Naver Webtoon. Une version animée chinoise en 22 épisodes a également vu le jour en avril 2023.
La série est disponible sur Netflix depuis le 20 octobre 2023 et a suscité un engouement immédiat auprès des spectateurs, qui l’ont déjà vue plusieurs fois pour nombre d’entre eux. Capturant avec une rare sensibilité la beauté d’un amour de jeunesse tourmenté, Doona! s’affirme en effet comme l’une des romances les plus marquantes de ces dernières années.
Le point de départ de Doona! paraît pourtant simple. Lee Won Jun (Yang Se Jong), un étudiant en deuxième année de fac d’ingénieur, emménage dans une maison partagée pour étudiants, où il rencontre Lee Doona (Bae Suzy), une ancienne idole de K-Pop. Contre toute attente, la célébrité mystérieuse commence à lui manifester un intérêt appuyé, allant jusqu’à le suivre dans l’amphithéâtre de l’université.
D’abord perplexe, Won Jun ne tarde pas à ressentir une immense confusion, d’autant qu’il voit bientôt ressurgir dans sa vie Kim Jin Joo (Ha Young), son premier amour de lycée, et Choi Ira (Park Se Wan), son amie d’enfance. Le chassé-croisé amoureux entre Doona et Won Jun finit par donner naissance à une histoire d’amour passionnée, mais les complications ne tardent pas à faire surface.
Dès son premier épisode, Doona ! nous enveloppe dans une atmosphère ouatée et étrangement familière, à l’image de cette belle maison que partagent les protagonistes. Avec son salon accueillant et ses nombreux recoins, le lieu est propice à l’insouciance, mais également aux secrets. Entre Doona qui a tout pour elle mais se complaît dans une position de spectatrice de la vie des autres, Won Jun qui étudie sans cesse sans jamais s’amuser, Jin Joo qui joue avec les sentiments de Won Jun, Ira qui n’arrive pas à oublier l’ex-petit ami qui l’a fait souffrir, et enfin les naïfs Gu Jeong Hun (Kim Do Wan) et Seo Yoon Taek (Kim Min Ho) qui ne savent pas sur quel pied danser avec les femmes, le drama offre un instantané vivant et nuancé d’une certaine jeunesse étudiante.
Pour autant, il ne s’agit pas d’un drama générationnel comme Twenty Five Twenty One. Ce n’est pas non plus une œuvre traitant de thèmes de société ni même un drame psychologique. Et si les errements de certains personnages semblent trouver leur origine dans un contexte familial particulier (abandon, parent toxique, famille dans la détresse), cet aspect vise seulement à éclairer leurs décisions présentes.
Non, Doona ! est un drama sur le sentiment. Le sujet de Doona!, ce sont les fluctuations émotionnelles de Doona et Won Jun au sein de leur relation hors du commun, et leur chemin vers la maturité dans cette relation. Un parcours salvateur mais parfois douloureux, qui met en exergue la notion de respect de l’autre comme de soi, notamment dans le refus de se faire maltraiter psychologiquement.
Dans cette logique, un grand soin est apporté à nous faire ressentir les états d’âme des deux protagonistes. Le drama est ainsi tout entier imprégné de la vision artistique du réalisateur Lee Jung Hyo, qui accorde une grande attention aux détails sensoriels ou symboliques, comme ces glaçons que Won Jun fait tomber par terre quand Doona s’approche de lui brusquement pour l’embrasser, ou le panneau de sens interdit situé à l’entrée du tunnel où se réfugient régulièrement les deux amoureux.
Portée par un rythme entêtant et une bande originale planante, la série Doona ! s’éloigne des codes narratifs habituels des dramas romantiques coréens pour se rapprocher de ceux du cinéma d’auteur, en particulier dans la structure libre de l’intrigue. L’extrême fluidité de la narration donne ainsi l’impression de regarder un long métrage en neuf chapitres dont la durée totale s’étendrait sur sept heures.
Une telle démarche s’appuie nécessairement sur le travail des acteurs. A ce titre, l’alchimie entre Bae Suzy et Yang Se Jong apparaît comme une évidence dès le début de la série. Elle éclate encore davantage lors d’une scène de séduction exquise où l’entreprenante Doona est troublée malgré elle par l’étudiant ingénu. A partir de là, la tension érotique entre les deux acteurs se fait toujours plus intense, donnant lieu à des scènes de baiser torrides qui comptent parmi les plus belles vues dans une série.
Dénuées de musique et utilisant la prise de son réelle, ces scènes surprennent par leur réalisme et leur authenticité. Elles sont mises en valeur par une photographie splendide que l’on doit à l’équipe lumière du drama Temperature of Love. Les visages des acteurs sont notamment sublimés tout en conservant leur grain de peau, ce qui ajoute au côté charnel de l’ensemble et diffère de la tendance actuelle des dramas coréens au lissage des traits.
Baignée dans une lumière à la fois douce et chatoyante, la scène de baiser du tunnel est à ce titre une véritable merveille d’esthétisme et de sensualité. La scène de baiser dans la cabane pousse encore plus loin cette sensualité débordante avec une mise en scène saisissante du rapprochement des corps, qui capture avec une délicatesse infinie tant l’essence du désir que celle de l’élan amoureux. Les deux acteurs créent ainsi à l’écran un moment intime d’une rare tendresse et dont il émane une émotion bouleversante, de celles qui continuent de vous étreindre longtemps après la fin de l’épisode.
Tout comme les scènes de bonheur de Doona et Won Jun nous mettent des papillons dans le ventre, leurs scènes de dispute font mal tant elles sonnent vrai. Lors de ces moments forts, les deux jeunes gens se confrontent avec une honnêteté et une maturité qui sont peu communes dans une série. Et ce, jusqu’au dernier épisode où Bae Suzy et Yang Se Jong livrent ensemble une performance virtuose au cours d’un échange tout en émotion brute – le réalisateur Lee Jun Hyo a d’ailleurs confié dans une interview que la scène avait été tournée en une seule prise.
De par son passé d’idole et sa beauté, Bae Suzy était le premier choix du réalisateur pour incarner l’ancienne idole Doona. Sans prendre cela pour acquis, elle livre un impressionnant travail de composition dans la peau de cette jeune femme charismatique qui dissimule sa solitude derrière une attitude aguicheuse et désinvolte. Tout au long du drama, elle captive notamment avec son regard direct, la richesse de ses expressions et son langage corporel élaboré.
Le rôle est d’autant plus difficile qu’elle doit également assurer le tournage des clips vidéo de son personnage ainsi que ses moments de scène, tournés en temps réel lors de la KCON Japan 2022. L’implication de l’actrice ne s’arrête pas là puisqu’elle a décidé elle-même du choix de la coiffure de Doona (la fameuse « Hime cut ») afin d’exprimer les aspirations contradictoires de celle-ci.
Avec Doona !, Bae Suzy poursuit ainsi la transformation opérée l’année dernière avec son rôle exigeant dans Anna, qui lui a valu de nombreuses récompenses, et s’impose comme l’une des jeunes actrices coréennes les plus intéressantes actuellement.
Yang Se Jong, 29 ans à l’époque du tournage, relève avec brio le défi d’incarner un étudiant de 21 ans, tant par sa beauté juvénile que par l’innocence qu’il dégage. Quatre ans après My Country: The New Age, où il livrait une performance spectaculaire en guerrier tragique, il choisit à l’inverse un personnage d’homme ordinaire, auquel il apporte une nouvelle fois de multiples dimensions.
Calme et naturel dans les scènes quotidiennes, il est celui qui fait grimper la tension sexuelle dans les scènes intimes avec son interprétation tour à tour fougueuse et à fleur de peau. Chaleureux lorsqu’il réconforte Doona, il se montre vulnérable dans les confrontations avec elle, comme lors de ce moment poignant où il la supplie, en larmes : « Demande-moi pardon (…) Dis-moi que tu m’aimes. Que tu m’aimes, moi, et pas lui » – la réplique est devenue culte pour les amateurs de la série.
Avec son regard profond et expressif, sa voix grave et chaude et sa sincérité de tous les instants, Yang Se Jong livre un jeu émotionnel à la fois intense et subtil, qui lui vaut déjà le surnom de « Maître du mélodrame » (« 멜로 장인 ») auprès des spectateurs.
Parmi les autres membres du casting, on retient l’interprétation nuancée de Ha Young (Now, We are Breaking Up), l’énergie contagieuse de Park Se Wan (So Not Worth It), la passion de Go Ah Sung (Tracer) qui s’éclate en star de K-Pop, et bien sûr le charme vénéneux de Lee Jin Wook (Bulgasal: Immortal Souls) dans un rôle pourtant particulièrement antipathique.
Doona ! est un drama qui possède le pouvoir de parler à chacun de nous en suscitant la réminiscence de souvenirs de jeunesse. En ce sens, il s’agit d’une œuvre riche, qui pousse à l’introspection. Un drama que l’on n’oublie pas.
Caroline Leroy
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